En Haïti, l’ONU suspend sa présence au respect des urnes

LeFigaro


03/12/2010


    À Port-au-Prince, entre 2000 et 3000 personnes ont encore défilé

    jeudi pour réclamer l’annulation du scrutin.

    La communauté internationale menace se désengager de l’île si celle-ci continue à s’enfoncer dans la crise post-électorale. La publication des résultats est annoncée pour le 7 décembre.

L’ONU ne veut pas cautionner un nouveau déni de démocratie en Haïti. «Si la volonté populaire n’est pas respectée», a prévenu jeudi le chef de la mission onusienne dans le pays, Edmond Mulet, «la communauté internationale se retirera (…) et le pays ne bénéficiera pas de l’appui et de ressources internationales». «Si la volonté du peuple est respectée et reconnue par le Conseil électoral haïtien, il n’y aura aucun problème», a-t-il néanmoins promis.

Depuis dimanche, le pays attend la publication des résultats du premier tour des élections, annoncée pour le 7 décembre. Les Haïtiens ont été appelés à élire leurs députés et sénateurs, ainsi qu’à désigner un successeur au président René Préval. Mais sans attendre l’annonce des résultats, un groupe de douze candidats à la présidence exige l’annulation des élections présidentielle et législatives. Celles-ci ont en effet été marquées par des incidents meurtriers et, selon eux, par des fraudes en faveur du candidat du pouvoir, Jude Célestin.

Un climat tendu règne donc dans le pays, où les manifestations publiques pour réclamer le départ du président sortant René Préval sont désormais interdites. Le parti au pouvoir en Haïti a reconnu mardi qu’il pourrait avoir perdu les élections présidentielle et législatives. À Port-au-Prince, entre 2000 et 3000 personnes ont malgré tout défilé jeudi, dans le calme, à l’appel des candidats à la présidentielle qui demandent l’annulation du scrutin.

12 personnes lynchées

Cette crise post-électorale inquiète la communauté internationale, dans un pays qui a connu coups d’État, régime dictatoriaux et élections truquées au cours de son histoire récente. Une fragilité politique aggravée depuis qu’un séisme a dévasté Haïti en janvier dernier, plongeant le pays le plus pauvre des Amériques dans le chaos.

L’épidémie de choléra qui s’en est suivie depuis la mi-octobre – le dernier bilan en date dénombre 1882 morts – ajoute encore aux tensions. Ainsi ces derniers jours, au moins 12 personnes sont mortes après avoir été lynchées dans une région du sud-ouest, soupçonnées de sorcellerie liée au choléra. Elles ont été tuées «à coups de machette, de pierres, et les corps ont été brûlés dans la rue», a indiqué un inspecteur de la police locale. Avant cela, la population s’en était déjà prise aux Casques Bleus, également accusés d’avoir propagé la maladie.

Autant d’ingrédients pour un cocktail potentiellement explosif, qui rend la présence des Casques bleus plus que jamais nécessaire. Créée à la mi-2004, la Mission de stabilisation de l’ONU en Haïti (Minustah), est prévue sur le long terme. Son mandat, périodiquement prolongé par le Conseil de sécurité, a encore été renouvelé pour un an en octobre. La semaine dernière, Edmond Mulet avait indiqué que la possibilité d’un «éventuel départ» ne serait pas examinée avant le printemps 2011, «si nous avons de bonnes élections (…) et qu’il y a un transfert de pouvoir démocratique».

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