Le chef de l’Etat confirme la tenue des élections présidentielles et législatives le 28 novembre et prend la défense de l’institution électorale qui serait “injustement diabolisée” ; faisant très peu de cas des revendications de l’opposition et de la montée de la contestation contre son régime Préval s’en prend à un rapport américain et affiche l’assurance d’un dirigeant politique souverain

mercredi 30 juin 2010,

Radio Kiskeya

L’Exécutif a rendu public mardi coup sur coup deux arrêtés présidentiels fixant au 28 novembre prochain la tenue des élections présidentielles et législatives pour le renouvellement du tiers du Sénat et de l’ensemble de la Chambre des Députés, une double mission confiée à un Conseil électoral provisoire dont la neutralité et la légitimité sont pourtant mises à mal.

Par ailleurs, le CEP au mandat désormais extrêmement élargi doit également combler, lors du même scrutin, tout autre poste vacant au Sénat et organiser ultérieurement des élections locales et indirectes.

Défendant avec opiniâtreté et assurance toutes les décisions passées de l’organisme électoral accusé par l’opposition d’avoir truqué les sénatoriales partielles de 2009, le Président René Préval a déclaré tout de go mercredi que “le temps des négociations est terminé”. “L’heure n’est plus aux manoeuvres dilatoires, mais aux élections”, a-t-il renchéri.

Minimisant les manifestations de rue organisées depuis un certain temps par des partis de l’opposition pour réclamer son départ, le chef de l’Etat a estimé lors d’une conférence de presse que les mouvements de protestation ne pourront nullement enrayer l’action de la machine électorale.

Flanqué du directeur général du CEP, Pierre-Louis Opont, il n’a eu de cesse de vanter l’indépendance, la neutralité de l’institution électorale et le “sérieux” de son arbitrage des différents cas de contestation qui avaient marqué les dernières législatives.

“Je sais comment gagner des élections, mais je ne sais pas organiser des élections”, a laissé entendre René Préval en réponse à une question sur la conduite du processus électoral après avoir rejeté un à un tous les arguments visant à remettre en cause l’autorité et la crédibilité de l’organisme électoral notamment sur l’exclusion politique dont seraient victimes des partis comme Fanmi Lavalas. Il a invité les pourfendeurs de la bande à Gaillot Dorsainvil à avancer des preuves pour étayer leurs accusations.

“Le CEP n’a écarté aucun parti de la course électorale, certains compétiteurs sont seulement tombés sous le coup des dispositions de la loi électorale”, a poursuivi le Président dans une allusion au parti de son ancien mentor Jean-Bertrand Aristide qui avait été interdit de participation au scrutin de 2009 en raison d’un problème supposé d’authenticité de mandat et de la présentation de deux listes de candidats sous la même bannière.

Sur sa lancée, il a qualifié d’irrecevable le rapport du Sénateur républicain Richard Lugar, membre de la commission des affaires étrangères du Sénat américain, qui a recommandé la réintégration des factions rivales de Lavalas dans la course électorale sur fond de sévères critiques relatives à l’absence de leadership du Président Préval depuis le séisme dévastateur du 12 janvier.

M. Préval, qui soutient que la levée de boucliers contre le Conseil électoral est un revirement post-séisme, affirme ne pas comprendre aujourd’hui l’opposition de la classe politique à une institution qui avait reçu les demandes d’inscription de 52 partis pour le scrutin qui devait se tenir en février et mars derniers.

Comme à son habitude, le chef de l’Etat a rappelé que la composition actuelle du CEP avait fait l’objet d’un consensus politique sur lequel il n’entend pas revenir.

Préval, qui nie avoir été à l’origine des graves événements politiques de 2004 à travers les élections contestées de 2000 organisées sous sa première présidence, n’a pas non plus oublié son thème favori, la stabilité politique, qui, à son avis, sera préservée grâce à l’organisation des prochaines élections.

Enfin, le très disert conférencier a fait savoir qu’aucune décsion n’a encore été prise sur le cas du conseiller électoral Jean Enel Désir mis en quarantaine et au centre d’un investigation de l’Unité de lutte contre la corruption (ULCC) pour son implication présumée dans le détournement de chèques d’employés du CEP.

“Le maître du temps gère le temps” a conclu le chef de l’Etat sur le ton de la plaisanterie en parodiant l’éditorialiste d’un quotidien de la capitale qui lui a décerné le titre de “maître du temps politique”.

Dans le cadre du renforcement de la “coopération régionale”, le dirigeant haïtien annonce son départ jeudi pour une tournée de plusieurs jours qui le conduira successivement à Cuba, à la Jamaïque et au Venezuela.

Divers leaders de la classe politique et de la société civile ont vivement réagi contre la décision unilatérale de l’Exécutif de reconduire le CEP et d’accroître ses responsabilités alors qu’une aile de l’opposition qui s’est radicalisée s’apprête à relancer les manifestations anti-Préval aussitôt terminée la trève du Mondial. spp/Radio Kiskeya