Port-au-Prince : La FAA bloque les vols, mais les avions continuent d’atterrir

Officiellement, l’aéroport de Port-au-Prince serait trop dangereux pour accueillir des vols commerciaux américains. Pourtant, des vols charters, diplomatiques, humanitaires et même des délégations présidentielles y atterrissent chaque semaine. Une situation paradoxale qui pénalise surtout les voyageurs ordinaires.

La Federal Aviation Administration (FAA) a prolongé jusqu’en mars 2026 la suspension des vols commerciaux américains à destination de l’aéroport international Toussaint Louverture de Port-au-Prince. Officiellement, cette décision est motivée par l’insécurité.

Pourtant, l’aéroport continue d’accueillir des vols charters, humanitaires, diplomatiques et même des délégations présidentielles. Beaucoup y voient une mesure sélective qui pénalise principalement les citoyens, tandis que les acteurs institutionnels et privés continuent d’y accéder sans difficulté.

En réalité, l’aéroport n’est pas à l’arrêt. Depuis l’annonce de la FAA, plusieurs types de vols y opèrent régulièrement. Le 6 février 2025, un avion cargo ukrainien y a livré un hélicoptère envoyé par le Salvador dans le cadre de la mission multinationale de soutien à la Police nationale d’Haïti. Le 18 juillet 2025, une délégation officielle menée par le président colombien Gustavo Petro a atterri directement à Port-au-Prince pour une visite diplomatique.

Le 8 octobre 2025, un vol charter de la compagnie AeroRegional a transporté 160 passagers vers le Brésil sans aucune restriction. Ces exemples démontrent que l’aéroport reste pleinement opérationnel, ce qui remet en cause la justification sécuritaire avancée par la FAA.

Pendant ce temps, ce sont les voyageurs ordinaires qui subissent les conséquences. Privés de vols directs vers la capitale, ils doivent transiter par la République dominicaine avant de traverser la frontière par voie terrestre, ou atterrir à l’aéroport du Cap-Haïtien et parcourir plusieurs heures de route pour rejoindre Port-au-Prince. Résultat : billets beaucoup plus chers, perte de temps importante, risques routiers accrus en raison de l’insécurité sur certains axes, fatigue et complications logistiques. Cette situation complique les déplacements professionnels, familiaux ou même médicaux.

Le paradoxe est encore plus frappant lorsque l’on constate que les États-Unis utilisent eux-mêmes régulièrement cet aéroport pour acheminer de l’aide humanitaire, faire atterrir des avions militaires ou gouvernementaux et déployer du personnel officiel. Si l’aéroport était réellement trop dangereux pour les vols commerciaux, pourquoi resterait-il le principal point d’entrée des opérations américaines en Haïti ?

Pour plusieurs observateurs, cette interdiction prolongée semble donc moins relever d’une mesure de sécurité que d’une décision politique ou d’un outil de contrôle. Malgré l’importance de cette décision, aucune explication détaillée n’a été fournie par la FAA. Beaucoup disent ne pas comprendre la logique de cette prolongation, surtout au moment où les vols charters et les visites officielles se multiplient.

Alors que la suspension des vols commerciaux américains se poursuit depuis près de dix mois, l’aéroport Toussaint Louverture continue d’être utilisé par ceux qui disposent des bonnes autorisations. Entre incohérence, impact économique et soupçons de stratégie politique, la décision de la FAA laisse planer une question centrale : cette interdiction protège-t-elle réellement les passagers ou sert-elle d’instrument de contrôle sélectif ?

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