L’ÉTAT DE JUXTAPOSITION RÉGRESSIVE

 

11 Mars 2023
L’état de Juxtaposition Régressive réunit les caractéristiques politiques et économiques d’une société dans laquelle le processus d’intégration sociale et de résolution des conflits a été stoppé, puis orienté vers des modalités de co-existence relationnelle non signifiante. Le phénomène, porteur de turbulences sociales sporadiques et  de crimes de masse dans son évolution et son temps de maturation, peut être diagnostiqué aussi bien dans les sociétés développées qu’en voie de développement. Compris dans sa formulation la plus manifeste et perceptible, le phénomène se présente comme une situation de voisinage, dans lequel les interférences, d’une communauté à une autre, d’un citoyen à un autre, obéissent à une logique d’enfermement, donc de coordination conflictuelle, laquelle à sa phase aigue ouvre les portes grande à l’instabilité et au génocide.
En phase avancée de Juxtaposition Régressive, la République d’Haiti cumule de nombreux traits de contradictions stationnaires, dont les plus marquants se retrouvent au niveau de l’éducation, de l’économie,  de l’organisation spatiale et du politique. Par contradictions stationnaires, nous entendons une variable de dynamique décisionnelle qui fait primer l’antithèse sur la thèse, qui privilégie la logique de l’apparence sur celle de la réalité, avec pour objectif pensé, calculé, de contourner la synthèse. Autrement dit et fait: de s’opposer à toute solution visant à résoudre les conflits. Ce processus singulier, inédit, par lequel l’antithèse neutralise le dépassement et la conversion des contradictions, est le lieu organique de production et  de maturation de la Juxtaposition Régressive. C’est fondamentalement le mécanisme absolu de maintien d’Haiti dans l’État de Non-Développement et d’inversion de ses origines héroïques de peuple. A terme, s’il faut de plus s’en tenir à la présence décennale des Nations-Unies en Haiti, à leurs desseins réitérés de tribalisation de la culture nationale, c’est une menace de démantèlement de la nationalité haïtienne, qui se profile à l’horizon.      
Enraciné dans notre passé colonial et esclavagiste, le processus de Juxtaposition Régressive attribue à chaque paramétré de l’équation sociale une aire de pratiques, dotées de bornes culturelles, éducatives, politiques et économiques, qui conditionnent la permanence des facteurs de régression de la société, en situation d’impasse historique  et de morcellement spatial. Ainsi, le Français,  langue de la coloniarité et de l’esclavagisme, donc en position de langue antithétique, est l’outil adopté par les dirigeants(à l’exception de  Henry Christophe)au lendemain de l’Indépendance. Le pas fatal est franchi. La thèse historique posée, qui découle de 1804,et qui imposait l’urgence du dialogue national, inséparable de celle de la défense de la première république anti-esclavagiste et anticolonialiste de l’histoire universelle, n’est pas assumée. Qu’est-il arrivé? L’antithèse s’est substitué à la thèse, en conséquence, pas de synthèse, c’est-à-dire, pas de recherche de solution, pas d’intégration. L’on se parle, sans dialoguer. L’on est cote-à-cote, mais l’on s’ignore.  L’on s’assied, sans s’écouter. La langue remplace la communication. La gestion de l’héritage colonial ne laisse pas de place à la quête de tactique et de stratégie de développement national. Langue de la négation, le Français, juxtaposé au Créole, divise la Nation et rend malaisé, pour ne pas dire impossible, les démarches d’intégration et de rapprochement sociaux, sans lesquelles les voies nouvelles de définition de la nouvelle nation ne sont pas ouvertes.  dialectique a déserté les segments de la culture : la planification à la base de la victoire de 1804 est ignorée. Depuis, le parler politique, en terre d’Haiti Thomas, est en apposition avec la méthode, la planification en situation de juxtaposition avec les besoins fondamentaux du peuple.
La dialectique de la négation a pris possession des institutions et structures politiques, économiques et sociales d’Haiti. Mises en contradiction par la mondialisation colonialiste et esclavagiste qui assiègent la nouvelle nation, les élites locales mettent à leur tour le peuple en apposition, en situation de juxtaposition stationnaire, afin de sauvegarder les vestiges de l’Héritage colonial.
L’école est juxtaposée à l’éducation.
Le morcellement agraire est juxtaposée à la politique de développement agricole.
La culture des vivres est juxtaposée à  la culture des denrées.
Le café est juxtaposé à la canne.
Les mornes(et les Négres des mornes)sont juxtaposés aux villes(et aux Négres des villes). 
Les fils et filles de la diaspora sont juxtaposés aux fils et filles de la mére-patrie.
La gestion est juxtaposée aux résultats.
La planification est juxtaposée à la méthode, le comment au pourquoi.
La Constitution est juxtaposée à la Démocratie.
QU’ajouter de plus pour appréhender les caractéristiques du phénomène, sinon s’interroger sur le mécanisme qui a prévalu et prévaut à son fonctionnement et à son pouvoir de dérégulation de tout processus de changement et de progrès en Haiti, d’hier à aujourd’hui.
La Taxation Totalitaire nous semble être au premier chef cause et condition de l’État de juxtaposition Régressive, phénoméne responsable de la fixation d’Haiti au stade du non-développement,avec ses corollaires d’injustices criantes et d’instabilités politiques chroniques. En effet, cila Taxation Totalitaire, qui réalise la coordination des entités mises en apposition. C’est par elle que se prolonge les séquelles de la ségrégation coloniale, qui stigmatise, fixe et dresse des murs. C’est par elle que le sang des cultivateurs de café, logés dans les mornes, a été capté en vue d’irriguer la culture en détresse de la canne dans les plaines. C’est par elle que le sang des frères et sœurs de la diaspora est fait dollars et abusé dans des tractations et opérations sans lien aucun avec les principes et les pratiques de planification financière. C’est par elle, la taxation totalitaire, que se consolide le processus de désintégration de l’économie nationale, réduite à une peau de chagrin, prise dans l’engrenage d’une dialectique de non-production, pendant de la déconstruction des fondamentaux de concertation, de courage et de sacrifices qui ont permis la fondation de la Nation et sa survie.
A quand l’identification des grandes régions économiques, dont la mise  en gestion et production agricole et industrielle mettront un point final à la dialectique de la juxtaposition régressive, qui désole Haiti, sa jeunesse et son peuple?
L’État de Juxtaposition régressive va de pair avec la réglé de la Taxation Totalitaire. Elle entretient et alimente les frontières culturelles, économiques et politiques au sein de la nation. En lieu et place des valeurs de dialogue, d’inclusion, de mise en commun, de fraternité, elle favorise les valeurs de séparation, de haine et d’éloignement.
Pas particulier à Haiti, l’État de juxtaposition régressive avance cependant à rythme accéléré vers des situations de conflits sociaux aigus, de nature à engendrer turbulences périodiques ou génocides, sous l’effet des carences économiques et de l’insécurité grandissante. Est-il trop tot pour s’engager à changer de route et aller à la rencontre de l’autre? Est-il trop tard pour avoir conscience claire et solidaire qu’en quelque point d’une superficie de 27750 kilomètres carrés, considéré comme lieu de non-droit, c’est la superficie totale qui se définit comme tel.
Les bornes et les frontières de la Juxtaposition Régressive ne sient pas au flamboyant Patrimoine de l’Humanité, qu’est Haiti.          
  Le comprendra-t-on enfin? 
Willem Roméus 
 
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