Guerre de tranchée entre Martelly et St-Juste

Me. Newton Saint-Juste revient à la charge après son audition par le parquet sur d’éventuels cas de détournements de fonds publics par la famille présidentielle. Selon ses accusations, plus de 40 millions de dollars auraient été détournés par l’épouse du Président et son fils-ainé.
31/08/2012

Me. Newton Saint-Juste revient à la charge après son audition par le parquet sur d’éventuels cas de détournements de fonds publics par la famille présidentielle. Selon ses accusations, plus de 40 millions de dollars auraient été détournés par l’épouse du Président et son fils-ainé.

« Association de malfaiteurs et usurpation de titre ». Tels sont les reproches adressés par Me Newton Saint-Juste à Sophia Martelly et à son fils-ainé Olivier. L’homme de loi a adressé une nouvelle correspondance au Parquet de Port-au-Prince pour lui demander d’engager des poursuites judiciaires contre ces prénommés pour détournement de fonds. Dans sa correspondance, Me Saint-Juste dit détenir les preuves de leur culpabilité.

L’accusation

Sophia Saint Rémy et Olivier Martelly auraient à leur disposition des fonds estimés respectivement à 30 millions de dollars pour des activités sociales et 11.2 millions pour la construction de plusieurs terrains de jeux. Me. Saint-Juste a été auditionné par le parquet la semaine dernière. S’exprimant en conférence de presse ce mercredi, il a accusé le commissaire du gouvernement de se comporter en défenseur de la famille Martelly, au lieu d’enquêter sur les faits avancés.

Son avocat, Me André Michel, un opposant déclaré au régime Tèt Kale renforce la l’accusation. La famille Martelly fait ombrage à certains ministères. « C’est la femme du président qui gère les fonds de plusieurs programmes. Notamment crédit rose, Ti manman cheri, Aba grangou. Son fils Olivier, lui, contrôle les fonds alloués au ministère des sports alors qu’ils ne sont pas comptables de deniers publics ». Pour Me Michel , c’est du détournement pur et simple.

Sceptique quant à la possibilité de la mise en mouvement de l’action publique contre la famille présidentielle, André Michel a énuméré « Les excès dont l’administration Martelly s’est rendue coupable au cours de la première année de son mandat ». « Gaspillage de fonds à travers le programme ‘Noël solidarité’ ; Carnaval des Fleurs ; voyages sans cesse à l’étranger ; création de plus de 22 ministères et autant de secrétaireries d’État et de directions générales adjointes…. »

Le dirigeant du groupe 77 appelle à la mobilisation générale contre le pouvoir en place. Dans un style qui rappelle son mentor en politique Evans Paul, André Michel a aussi exprimé « sa déception » quant à l’issue de la rencontre entre le président Michel Martelly, les partis politiques, les parlementaires et la société civile. « Michel Martelly fait peu de cas des propositions des dirigeants politiques. Il l’a montré en décidant de maintenir l’actuel CEP totalement acquis à sa cause pour organiser les prochaines élections ».

Pour l’homme de la basoche, c’est la preuve par quatre que le chef de l’État veut installer un régime dictatorial dans le pays. Ainsi, de façon ex-cathedra, convie-t-il toutes « les forces vives du pays à se mobiliser en vue de faire échec au plan de Michel Martelly ».

La réplique

Le Président Michel Martelly s’est porté en défenseur légitime de sa famille. Dans une intervention mardi dernier sur Scoop FM, le chef de l’État s’est inscrit en faux contre les dénonciations de Newton St-Juste. Il ridiculise les accusations d’association de malfaiteurs et usurpation de titre des siens. « Ni ma femme ni Olivier n’ont droit aux dépenses. Ils n’ont pas accès à l’argent », a précisé le président Martelly.

Appelant sa femme, la première dame, un titre qui n’est pas prévu par la constitution, le chef de l’Etat révèle que Sophia Martelly n’a pas vraiment de bureau. « Elle veut se rendre utile à la nation en s’impliquant dans des projets visant à changer les conditions de vie de la population ». Dans sa réplique, le président qualifie d’opportunité le fait que « sa femme soit si dévouée pour la cause haïtienne ».

S’abstenant de citer le nom de l’avocat l’incriminant, Martelly salue tout de même « sa démarche qui prouve qu’il y a encore de la démocratie en Haïti. Je suis très content que l’avocat ait porté plainte. En d’autres périodes, il n’oserait pas le faire. Cela aurait eu des conséquences sur sa personne ».

Dans sa lettre adressée au chef du parquet et publiée récemment dans nos colonnes, Me Newton Saint-Juste, avait tenu de rappeler que la Première dame n’a aucun statut juridique l’habilitant à jouer un quelconque rôle dans l’ordre politique, administratif et juridique du Pays ou dans la gestion des institutions publiques. « Elle ne bénéficie d’aucun privilège juridictionnel ou protocolaire. Elle n’a aucune place dans le budget et dans les écrits gouvernementaux ou officiels » Pour Me Saint-Juste, Sophia Martelly n’est pas co-titulaire de la fonction présidentielle avec son époux et n’est qu’une citoyenne parmi les autres jouissant d’une situation conjugale ou familiale. Il en est de même pour son fils, Olivier, conseiller du chef d’Etat pour la Jeunesse qui a aussi son cortège.

Et l’avocat de conclure « qu’à cet égard, toute intervention de leur part au nom et pour le compte des institutions publiques est subordonnée à l’accomplissement des formalités prévues par les règles régissant la fonction publique. Et, toutes les fois qu’il est question de gestion ou de maniement des deniers publics à quelque titre que ce soit, il est avant tout question pour ces deux citoyens de reddition de compte ».

Eddy Jackson Alexis

alexis2ajh@yahoo.fr

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