A propos de notre micmac constitutionnel

Le Nouvelliste | Publié le : 01 août 2014

Les partis politiques ainsi que les organisations de la société civile impliquées dans l’observation des élections doivent être de plus en plus vigilants pour forcer l’institution électorale à s’engager dans la voie de la transparence. En aucun cas, les six partis politiques et les six sénateurs hostiles à l’amendement de la loi électorale ne peuvent obtenir gain de cause. L’esprit de l’article 289 de la Constitution de 1987 ne peut servir d’argument pour contester le CEP replâtré à la suite de l’Accord d’El Rancho. Avec neuf personnalités issues de neuf institutions, le Conseil électoral provisoire serait plus crédible. Cependant, l’article 289 reproduit dans la Constitution amendée ne tient plus, en raison de l’inexistence du Conseil national de gouvernement. Les articles 289, 289.1, 289.2, 289.3 n’ont aucune valeur juridique étant donné qu’ils sont liés à l’existence d’un gouvernement provisoire. Ces articles ont été reproduits dans la Constitution amendée par erreur.

Il serait bienséant de parler de l’esprit de l’article 191 de la Constitution amendée en lieu et place de celui de l’article 289. L’absence d’un Sénat avec la totalité de ses membres empêche la mise en place du Conseil  électoral permanent conformément à la Constitution. Dans cette optique, l’esprit de cet article peut être évoqué en vue de former le Conseil électoral provisoire. Ce qui a été fait pour la mise en place du Conseil présidé par Max Mathurin. » [Fin de citation]

On se rappelle dans un éditorial en date du 24 mai 2011, paru sous la signature de Lemoine Bonneau intitulé : « Sur quelle Constitution Martelly a-t-il prêté serment ? »,

l’éditorialiste avait conclu ainsi : « Si les erreurs matérielles contenues dans la publication de la loi constitutionnelle ne peuvent pas enlever le caractère souverain du vote des deux Chambres en Assemblée nationale, on peut prétendre qu’il a prêté serment sur la Constitution amendée. » [Fin de citation] (Source: http://lenouvelliste.com/lenouvelliste/article/92904/Sur-quelle-Constitution-Martelly-a-t-il-prete-serment.html)

Faux, Mr Martelly avait prêté serment sur la Constitution de 1987 non amendée. l’éditorialiste s’était trompé, je veux croire de bonne foi, pour avoir négligé de consulter la Constitution de 1987 amendée ou pas sur les procédures concernant l’amendement de la constitution en particulier l’article 284.2 dons nous reproduisons le contenu.

ARTICLE 284.2: L’amendement obtenu ne peut entrer en vigueur qu’après l’installation du prochain Président élu. En aucun cas, le Président sous le gouvernement de qui l’amendement a eu lieu ne peut bénéficier des avantages qui en découlent.

Sur quelle base cette fois, l’éditorialiste s’est-il permis d’affirmer que: « Les articles 289, 289.1, 289.2, 289.3 n’ont aucune valeur juridique étant donné qu’ils sont liés à l’existence d’un gouvernement provisoire. Ces articles ont été reproduits dans la Constitution amendée par erreur. »

Pourtant, depuis l’adoption de la Constitution de 1987 toutes les élections qui ont eu lieu ont utilisé l’esprit de l’article 289 pour la formation du Conseil Electoral Provisoire et c’est encore de ce même esprit que s’inspirait la Proposition d’Amendements de 2009. Je l’invite à vérifier dans Le Moniteur No. 109 du mardi 6 octobre 2009, au SOMMAIRE « Déclaration du Corps Législatif relative à l’Amendement de la Constitution de 1987 », en particulier les propositions d’amendements des articles 289 et 289.3 votés par la 48eme Législature et proposés à la 49eme pour adoption. Pour son bénéfice et celui des lecteurs je les reproduis ci-dessous car ils sont en conformité avec les changements:

L’article 289 se lit désormais comme suit : En attendant l’établissement du Conseil Électoral Permanent prévu dans la présente Constitution, le Pouvoir Exécutif met en place unConseil Électoral Provisoire de neuf (9) Membres composé de représentants du Secteur Public, des Partis Politiques et des Organisations de la Société Civile.

L’article 289.3 se lit désormais comme suit : La mission de ce Conseil Électoral Provisoire prend fin à l’entrée en fonction du Conseil Électoral Permanent.

Les articles 289.1 et 289.2 n’avaient pas été proposés pour être amendés. Ils étaient donc « verrouillés » et  par conséquent reproduits tels quels et non par erreur. Pour le bénéfice des lecteurs, je les reproduis ci-dessous car ils sont en conformité avec les changements proposés aux articles 289 et 289.3 par la 48eme Législature:

ARTICLE 289.1: Dans la quinzaine qui suivra la ratification de la Présente Constitution, les Corps ou Organisations concernés font parvenir à l’Exécutif le nom de leur représentant.

ARTICLE 289.2: En cas d’abstention d’un Corps ou organisation sus-visé, l’Exécutif comble la ou les vacances.

J’invite à nouveau l’éditorialiste à consulter Le Moniteur No. 58 du vendredi 13 mai 2011, au SOMMAIRE : « Loi Constitutionnelle Portant Amendement de la Constitution de 1987 ». Il devrait se rappeler très certainement les accusations, non vérifiées, portées contre l’Exécutif d’alors après publication du document tel que reçu du Corps Législatif moins de 7 heures avant le samedi 14 mai 2011, jour de l’installation du président élu prévue pour 8 :00 du matin. La vérité a été établie sur l’identité des falsificateurs qui siégeaient tous au parlement et qui sont les principaux responsables de l’échec cuisant de la pièce maitresse des propositions d’amendement de 2009 : « l’harmonisation de tous les mandats électifs à cinq (5) ans à partir de 2016».

L’éditorialiste notera très certainement que dans ledit Moniteur, les articles 289 et 289.3 ne figurent pas, ce qui implique qu’après lecture du Moniteur ils n’ont pas été adoptés par la 49eme Législature et qu’aucune modification n’a été faite aux articles en question. Seule une revue de la vidéo de la séance et non pas une simple lecture des minutes du vote de l’Assemblée Nationale peut déterminer exactement ce qui s’est passé avec le vote de ces deux articles 289 et 289.3 car on avait affaire avec des falsificateurs professionnels au parlement dont trois font actuellement partie des supers conseillers du président. On y reviendra.

Après le scandale ayant suivi la publication, le 17 mai 2011 trois (3) jours après l’installation du président Martelly, le président de l’Assemblée Nationale et par la suite ministre de la Défense de l’actuel président, Jean Rodolphe JOAZILE, avait envoyé une correspondance: Réf.: SRH-PS-JRJ/49-0046 au président de la République pour l’informer « qu’en parcourant la loi constitutionnelle publiée dans le Moniteur du vendredi 13 mai 2011, le Bureau a relevé d’importantes erreurs matérielles au niveau des articles 63, 68, 78, 92, 92-1, 92-3, 94-3, 94-4, 94-5, 94-6, 95 et 190 bis.1 qui endommagent gravement le texte voté en Assemblée Nationale. En conséquence, le Bureau de l’Assemblée Nationale vous saurait gré de bien vouloir faire publier dans le journal officiel Le Moniteur une reproduction pour erreurs matérielles de la loi constitutionnelle portant amendement de la Constitution de 1987. Vous voudrez bien trouver ci-joint le texte original.»** [Fin de citation]

On a su bien après qu’aucun suivi n’avait été donné à cette correspondance. Le président Martelly avait simplement pris un arrêté pour mettre en veilleuse la « Loi Constitutionnelle Portant Amendement de la Constitution de 1987 ».

Toutefois il est important de savoir qu’avec cette seconde soumission du «texte original» à l’Exécutif le 17 mai 2011, le président de l’Assemblée Nationale, Jean Rodolphe JOAZILE, venait de récidiver en soumettant un second faux au nouveau président.

Détenteur d’une copie complète de cette « rarissime » correspondance du 17 mai 2011 au président Martelly (jamais officiellement publiée mais faisant partie des archives du Parlement et du Palais National), j’ai relevé beaucoup d’altérations et ajouts d’articles non votés  par l’Assemblée Nationale en comparant le « texte original » envoyé à l’actuel président et celui publié dans le Moniteur du 13 mai 2011. Je vais partager les plus importants avec l’éditorialiste et les lecteurs :

1- L’article 134.1 amendé publié dans le Moniteur du 13 mai 2011, reproduit ci-dessous, a disparu dans le « texte original » soumis par Joazile le 17 mai 2011.

L’article 134.1 se lit désormais comme suit : La durée du mandat présidentiel est de cinq (5) ans.

2- L’article 137 dument voté par l’Assemblée Nationale n’a pas été publié dans le Moniteur du 13 mai 2011. Voici le contenu selon la vidéo du vote au parlement :Source: http://youtu.be/GoZJCHEA5sE

L’article 137 se lit désormais comme suit : Le Président de la République choisit un Premier Ministre parmi les membres du Parti ayant la majorité absolue au Parlement. La majorité est établie sur la base des résultats électoraux des élus dans chacune des deux Chambres. A défaut de cette majorité, le Président de la République choisit le Premier Ministre en consultation avec le Président du Sénat et celui de la Chambre des Députés.

Voici le texte de l’article 137 illégalement modifié car non conforme au vote mentionné plus haut. On notera que dans l’article falsifié le terme « absolu » a disparu et que la dernière phrase a été ajoutée. (Source: « texte original » soumis le 17 mai 2011)

Article 137 se lit désormais comme suit : Le Président de la République choisit son Premier Ministre parmi les membres du Parti ayant la majorité au Parlement. La majorité est établie sur la base des résultats électoraux des élus dans chacune des deux Chambres. A défaut de cette majorité, le Président choisit le Premier Ministre en consultation avec le Président du sénat et celui de la Chambre des Députés. Dans les deux (2) cas, le choix doit être ratifié par le parlement.

3- L’article 218 amendé publié dans le Moniteur du 13 mai 2011, reproduit ci-dessous, a disparu dans le « texte original » soumis par Joazile le 17 mai 2011.

L’article 218 se lit désormais comme suit : Aucun impôt au profit de l’État ne peut être établi que par une loi. Aucune charge, aucune imposition, soit départementale, soit  municipale, soit de section communale, ne peut être établie qu’avec le consentement de ces collectivités territoriales.

4- Les articles 266 et 267.2 publiés dans le Moniteur du 13 mai 2011, reproduits ci-dessous, ont disparu dans le « texte original » soumis par Joazile le 17 mai 2011.

L’article 266 se lit désormais comme suit :

Les Forces Armées d’Haïti ont pour attributions:

1. Défendre le pays en cas de guerre;

2. Protéger le Pays contre les menaces venant de l’extérieur;

3. Assurer la surveillance des frontières terrestres, maritimes et aériennes;

4. Prêter main forte sur requête motivée de l’Exécutif, à la Police au cas où cette dernière ne peut répondre à sa tâche;

5. Aider la nation en cas de désastre naturel;

6. Outre les attributions qui lui sont propres, les Forces Armées d’Haïti peuvent être affectées à des tâches de développement.

L’article 267.2 se lit désormais comme suit : La carrière militaire est une profession. Elle est hiérarchisée. Les conditions d’engagement, les grades, promotions, révocations, mises à la retraite, sont déterminés par les règlements des Forces Armées d’Haïti.

5- L’article 285 publié illégalement dans le Moniteur du 13 mai 2011 est un faux car cet article a été supprimé par vote de l’assemblée nationale, en même temps que les articles 285.1, 286, 287 et 288. Pour information voici son contenu publié par les falsificateurs de l’assemblée nationale :

L’article 285 se lit désormais comme suit : Le Conseil Electoral Permanent et le Conseil Supérieur du Pouvoir Judiciaire doivent être installés trois (3) mois après l’entrée en vigueur de la Constitution amendée.

Dans le « texte original » soumis au Président Martelly le 17 mai 2011 par le Président de l’Assemblée Nationale l’article 285 a disparu mais «ses attributions » illégalement réintroduites sous le couvert du controversé article 289 avec un autre ajout doublement illégal, l’article 289.1 qui ne faisait pas partie des articles proposés pour être amendés. Donc un article « verrouillé » a été utilisé pour introduire un texte illégal.

6- Les articles 289 et 289.1 dont nous reproduisons le contenu n’ont jamais été présentés à l’assemblée nationale pour un vote, toutefois ils sont ajoutés au « texte original » soumis par Joazile le 17 mai 2011 au nouveau pouvoir.

L’article 289 se lit désormais comme suit : Le Conseil Electoral Permanent et le Conseil Supérieur du Pouvoir Judiciaire doivent être installés trois (3) mois après l’entrée en vigueur de la Constitution amendée.

L’article 289.1 se lit désormais comme suit : Dans les deux mois qui suivront la publication de la Constitution amendée, les trois (3) Pouvoirs concernés font parvenir à l’Exécutif les noms de leurs représentants.

7- L’article ajouté 295.1 dument voté par l’Assemble Nationale n’a pas été publié dans le Moniteur du 13 mai 2011 . Voici le contenu selon la Vidéo du vote au parlement :

Vote article 295.1 : http://www.youtube.com/watch?v=MX0RFRfudCg&feature=email

Il est ajouté un article 295.1 qui se lit comme suit : Lors de la première composition du Conseil Constitutionnel, les trois premiers membres nommés sur la liste du Pouvoir Exécutif, de l’Assemblée Nationale, du Conseil Supérieur du Pouvoir Judiciaire le seront pour neuf (9) ans, les deuxièmes pour six (6) ans et les trois autres pour trois (3) ans.

Ce n’est que dans la soumission du « texte original » soumis par Joazile le 17 mai 2011 que cet article est apparu. Il revient au Corps Législatif d’expliquer son omission dans le texte soumis le 13 mai 2011 pour publication dans le Moniteur.

8- L’article 298 n’a jamais été voté par l’Assemblée Nationale donc n’a pas été publié justement dans le Moniteur du 13 mai 2011.  Par contre, il est inclus dans le « texte original » soumis par Joazile le 17 mai 2011 à la nouvelle Administration et constitue un faux additionnel. Nous reproduisons son contenu pour le bénéfice de l’éditorialiste et des lecteurs.

L’article 298 se lit désormais comme suit : Les Présents amendements à la Constitution de 1987, après promulgation et publication dans le journal Officiel, le Moniteur, entrent en vigueurà l’installation du futur Président de la République, le 14 mai 2011.

Il convient de souligner pour le bénéfice de tous, que l’article 298 est non seulement un faux car n’ayant pas l’aval d’un vote, mais que de plus son contenu est en contradiction flagrante avec celui de l’article 284.2 non amendé de la Constitution de 1987 qui stipule que les amendements entrent en vigueur « après » et non pas «  à » l’installation du prochain Président élu :

ARTICLE 284.2: L’amendement obtenu ne peut entrer en vigueur qu’après l’installationdu prochain Président élu. En aucun cas, le Président sous le gouvernement de qui l’amendement a eu lieu ne peut bénéficier des avantages qui en découlent.

Finalement la Constitution amendée fut mise en veilleuse par le président Martelly par un Arrêté présidentiel le 3 juin 2011 qui fut annulé par un autre Arrêté en date du 19 juin 2012, et après (reproduction pour erreurs matérielles) dans Le Moniteur du 19 juin 2012, la Loi Constitutionnelle portant amendement de la Constitution de 1987 est retournée en application. Il a fallu toute une année plus 16 jours pour rendre applicable la Constitution amendée sans pour autant identifier publiquement le ou les coupables de ce forfait pour que cela ne se reproduise plus en Haïti et mette enfin un terme au règne de l’impunité. Tout au contraire, L’ex-sénateur Jean Rodolphe Joazile, principal responsable de cette forfaiture en tant que président de l’Assemblée Nationale, s’est vu récompenser d’un poste ministériel dans l’actuel gouvernement au terme de son mandat de parlementaire.

Ces imposteurs nous ont valu l’annulation plus que déplorable de l’harmonisation des mandats de tous les élus qui était prévue pour 2016 et présentement renvoyée sine die. Ils ont pu ensuite infiltrer le nouveau pouvoir comme Super Conseillers pour nous imposer la présente conjoncture due à leur tentative d’installer un Conseil Electoral Permanent illégal après avoir quitté le Sénat réduit à 20 membres donc impossible de désigner leurs représentants de concert avec la Chambre des Députés à cause de leur propre modification, lors du vote pour l’adoption des amendements proposés par la 48eme Législature, à l’article 192 en introduisant un vote qualifié de deux tiers (2/3) de chacune des deux chambres.

Quatre jours après la publication le 13 juin 2011 de la Constitution amendée de 1987, le Président de l’Assemblée Nationale, avec une légèreté sans pareille, écrivait au président de la République pour lui demander de bien vouloir accepter le « texte original » des articles amendés sans pour autant préciser la nature du texte contenant les amendements qu’il avait envoyé le 13 mai 2011 à l’ancien Exécutif pour publication ou s’il y avait eu altération ou fraude par une tierce personne dans la publication dudit texte, surtout qu’il y avait des accusations jamais démenties par le Bureau de l’Assemblée Nationale. L’accusation d’un bouc émissaire en dehors du parlement convenait bien au sénateur Joazile pour ne pas révéler au grand jour son immense négligence ou incompétence pour conduire à bon port un vote pour amender une constitution.

Dans ce fameux « texte original », Mr Joazile et complices ont commis parjure en essayant :

Lettre du président de l’Assemblée Nationale, Jean Rodolphe JOAZILE, au président Martelly, datée du 17 mai 2011

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