Steven Benoit rejoint l’opposition

Le Matin: Fini le temps de l’harmonie entre Michel Martelly et Steven Benoit. Le premier sénateur de l’Ouest se dit offusqué des multiples initiatives illégales de la présidence. Il rejoint, de fait, Moïse Jean-Charles dans l’opposition.

Longtemps considéré comme allié de Michel Joseph Martelly, Steven Benoit a officiellement annoncé son divorce avec le président de la République. Le premier sénateur de l’ouest reproche au chef de l’État la façon dont il gère le dossier des élections et le Conseil électoral provisoire. Le refus du chef de l’Etat de publier la version corrigée de la constitution, la nomination des directeurs généraux, le fonds d’éducation non régi par une loi et le refus de M. Martelly de choisir les juges en cassation, constituent, selon le sénateur, la pomme de discorde.

Steven Benoit s’est toujours insurgé contre les démarches jugées illégales. Ancien membre de la plateforme Lespwa, il a pris ses distances avec les grands barons de cette structure politique. En maintes occasions, malgré le fait qu’il faisait partie d’un groupe minoritaire, il n’a pas hésité à se dresser contre les manœuvres illégales de la présidence de René Préval. Au début de l’administration de Michel Martelly, seul le deuxième sénateur du Nord, Moïse Jean-Charles se dressait ouvertement contre la présidence. La désignation de Garry Conille a contribué à augmenter la liste. M. Jean-Charles aura, cette fois, un compagnon. Les initiatives prises jusqu’ici par le chef de l’État révoltent même ses collaborateurs les plus proches.

En moins de cinq mois la liste des violations de la part du chef de l’État est très longue. Michel Martelly est fatigué des exigences constitutionnelles. La politique de doublure est révolue. Il a montré ses griffes. Plusieurs directeurs généraux et délégués départementaux ont été nommés, selon plus d’un, en dehors d’un conseil de ministres. Certains parlementaires ont annoncé pour bientôt la convocation du premier ministre en vue d’une explication à la nation. Le procès-verbal de la rencontre est exigé. Depuis, le débat sur la légalité et la légitimité de ces décisions est lancé. Certains grands noms du parlement se taisent et se complaisent face à ces dérives si graves. Pourtant ils brandissent leur constitution pour faire valoir leurs intérêts inavouables et inavoués. Steven Benoit ne veut pas être complice des exactions de la présidence.

Plus besoin de passer par quatre chemins. Il est impossible de donner six mois de répit à M. Martelly. La République va mal. Et, le président n’est pas en train d’arrêter cette dérive. Le chef de l’État a même fragilisé davantage les institutions du pays. Une liste de douze cas d’irrégularités lui est reprochée. Le sénateur Benoît indique, par ailleurs avoir relevé des anomalies graves de la part du chef de l’État. « Il a manifesté à maintes reprises le désir de tout accaparer » a martelé le père conscrit de la nation.

Concernant la cours de cassation et le Conseil supérieur de la Police judiciaire, Benoit se dit choqué du comportement du président qui a renvoyé la liste à l’assemblée des sénateurs, alors que tout est en ordre. Il croit que cette décision montre clairement que Martelly compte tout manipuler. Il affirme par ailleurs que le président ne veut pas que la Cour de cassation et le CSPJ fonctionnent normalement.

A en croire M. Benoit, la validation des résultats controversés des législatives d’avril dernier dans les deux des quatre circonscriptions est la dernière goutte qui fait déborder le vase. Selon le parlementaire, ces élections auraient dû être annulées et reprises intégralement. Steven Benoit croit par-dessus tout que le chef de l’État ne veut pas vraiment de la scolarisation universelle de tous les enfants. Le projet d’éducation gratuite n’a jusqu’à présent aucune base légale. « Si le président voulait effectivement la scolarisation d’un plus grand nombre d’enfants haïtiens, il aurait publié la loi sur les frais scolaires » a-t-il martelé.

Le sénateur annonce, à cet effet, que les responsables de ce programme et toutes les institutions appuyant cette initiative, étatiques ou privées, auront à rendre compte au parlement. Il fustige, en effet, le comportement des responsables de la Banque centrale qui s’impliquent directement dans le prélèvement de taxes sur les transferts d’argent et les appels téléphoniques.

Le refus de demander le retrait des casques bleus du le sol haïtien est incompréhensible. Partout ailleurs, on réclame le départ de ces troupes. Le président persiste et signe, il faut des initiatives haïtiennes en vue du remplacement de la Minustah. Entretemps, une force armée est sur le point d’être mise sur pied à l’insu des parlementaires. Seule la communauté internationale et certaines ambassades du pays sont au courant de cette décision. Le parlement est sollicité alors seulement au gré de la présidence. Le devoir de contrôle de ce corps est, en effet, pris d’assaut.

Il n’est plus question de consulter le parlement pour les grandes décisions qui engagent la nation. La cause peut être le manque d’une majorité réelle de la présidence dans les deux chambres. La collaboration entre les deux co-dépositaires de la souveraineté nationale est loin d’être harmonieuse. Et, perdre un allié comme Steven Benoit peut se révéler fatal pour la présidence déjà en mal d’enfants à la chambre haute. Mais, le locataire du palais national est, selon toute vraisemblance, sur le point de gagner la confiance de Joseph Lambert, l’un des chefs de l’Inite. A quel prix ? Sénateur Benoit est sur le point de se trouver sans alliés convaincants au grand corps.

Jose Flécher
flecherjosew@yahoo.fr
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