Martelly s’est trompé sur l’application de ‘’l’article 12’’

Le chef de l'Etat, Michel Martelly, lors de la signature de l'Accord El Rancho

Le Nouvelliste | Publié le : 22 avril 2014

L’article 12 de l’Accord d’El Rancho ne peut être appliqué sans le consentement des parties qui ont paraphé le document. C’est l’avis d’une source proche de la Conférence épiscopale d’Haïti (CEH) et aussi celui du professeur Rosny Desroches, membre de la commission de suivi de l’accord.

A lui seul, le président de la République ne peut pas décider de l’application de l’article 12 de l’Accord d’El Rancho. En menaçant d’appliquer cet article, Michel Martelly s’est trompé sur l’esprit du document, selon une source proche de la CEH. Le professeur Rosny Desroches, membre de la commission de suivi de l’accord a, de son côté, estimé que cet article ne peut pas être appliqué sans le consentement de toutes les parties, à savoir l’exécutif, le Parlement et les partis politiques. Une façon claire pour lui de dire que le chef de l’Etat ne peut le faire seul sans un consensus. « Je pense qu’aujourd’hui, a-t-il dit mardi au Nouvelliste, il faut qu’il y ait un échange, un troisième ou un quatrième round de négociations ». Selon lui, les sénateurs ont une certaine réticence sur la formation du Conseil électoral puisque la plupart d’entre eux vont participer aux prochaines élections. M. Desroches a annoncé que la commission va rencontrer les acteurs signataires de l’accord.

Le directeur exécutif de l’Initiative de la société civile (ISC) a souligné que la commission de suivi ne s’est pas encore réunie sur les récentes déclarations du chef de l’Etat relatives à l’application de l’article 12 de l’Accord d’El Rancho. La commission devait avoir sa première grande réunion mardi après-midi, depuis le remplacement des trois anciens membres devenus ministres : Himmler Rébu, Rudy Hériveau et Patrick S.W. Joseph.

Une source proche de la Conférence épiscopale d’Haïti (CEH) qui a souhaité garder l’anonymat a fait savoir au Nouvelliste qu’une seule partie ne peut prendre sur elle-même d’appliquer l’article 12 du document. « Un accord reste un accord. Sans l’implication de tous les acteurs impliqués, il n’y a pas d’accord », a-t-elle dit.

Notre source, un religieux catholique influent, a indiqué que la CEH a des préoccupations sur le devenir de l’Accord d’El Rancho dont « l’avenir n’est pas assuré ». « Nous sommes inquiets parce que les choses ne sont pas encore à leur place », a-t-elle dit, soulignant, parallèlement, que le processus du dialogue a mis le pays sur la bonne direction et malgré la situation de blocage nous avançons quand même.

« Si c’est le président Martelly qui applique l’article 12, cela voudrait dire que l’Accord d’El Rancho a été signé uniquement par le président, sans l’implication des autres acteurs. Tout le monde doit se mettre d’accord pour l’application de cet article », a ajouté notre source.

Elle estime que nous ne pouvons pas avancer parce que les acteurs ne sont pas encore arrivés à « l’accord dont nous avons besoin ». « L’article 12 avait prévu cette situation parce que nous fonctionnons dans un champ politique où il y a des coups hauts et des coups bas », a lâché notre source. Avant de se prononcer clairement sur l’évolution de la situation, la CEH attend un rapport de la commission de suivi. Pour le moment, les évêques laissent la commission faire son travail.

Avant de quitter le pays, samedi, pour Taïwan, le chef de l’Etat avait déclaré que si les sénateurs ne votent pas, avant son retour, samedi prochain, l’amendement de la loi électorale, « nous serons dans l’obligation de mettre en application ce que l’Accord d’El Rancho avait dit ». Les sénateurs qui s’opposent au vote de l’amendement du document ont rapidement dénoncé ces déclarations et mis en garde Michel Martelly.

Selon l’article 12 de l’Accord d’El Rancho : « Dans le cas où les amendements à la loi électorale prévus et proposés dans le cadre du dialogue ne sont pas votés par les deux branches du Parlement dans le délai imparti à l’article huit du présent accord, les parties constatent avec le Conseil électoral provisoire (CEP) l’impossibilité matérielle d’appliquer les articles visés. En conséquence, les parties conviennent que ces dits articles entrent automatiquement en veilleuse et l’organisme électoral est autorisé à y passer outre ».

Robenson Geffrard

rgeffrard@lenouvelliste.com

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