Le cas Jean-Wilbert Elma

Le Nouvelliste | Publié le : mercredi 06 juin 2012
Dr Frantz Bernadin Chercheur en paranormal frantzbernadin@yahoo.fr Pour en savoir plus
La dépouille exposée jeudi matin dans une église.
La dépouille exposée jeudi matin dans une église.
Natacha Bazelais
Jean Wilbert Elma, 53 ans, déclaré mort par une équipe médicale, a été conduite à une morgue privée de la région métropolitaine, où il a passé dix jours. Et pourtant lors de ses funérailles, le jeudi 24 mai dernier, ses parents se sont rendu compte qu’il n’était pas vraiment mort et que le ”cadavre” saignait, suite aux tortures que le corps du prétendu mort avait subies à la morgue. Cette affaire a défrayé la chronique et continuera certainement. Nous n’entrerons pas ici dans la dimension morale et judicaire du problème, quitte à la justice de faire son travail.. En notre qualité de chercheur, nous nous intéresserons uniquement à l’aspect médical de la question, a savoir : un diagnostic erroné. Dans notre article sur le cas Christella (Nouvelliste du jeudi 26 avril 2012), et même dans des textes antérieurs, nous avons montré combien il est difficile de déterminer la mort clinique. Déclarée morte le 7 avril, l’adolescente est revenue à la vie 7 jours après dans une morgue de la capitale.
L’erreur de Romeo Nous avons montré dans cet article que même dans les pays avancés où la médecine se pratique à l’aide d’appareils sophistiqués, il n’est pas facile de diagnostiquer la mort’. Donc l’erreur de Romeo est toujours présente, comme en atteste le cas suivant : José Gomez, un sexagénaire opéré de la gorge, se trouvait dans un état critique. Le centre hospitalier de Nevers où il était en traitement l’avait rendu à ses parents. « Afin d’atténuer ses douleurs, il lui avait été administré une forte dose de calmants. Le voyant dans un complet état d’inertie, sa famille avait alors fait appel à un médecin qui, connaissant l’état du malade et en présence d’une extrême atonie et d’un manque de pouls, délivra un certificat de décès. Le décès fut enregistré à la mairie de Malzy, mais quelques heures après, l’effet des calmants ayant cessé, M. Gomez, à la stupéfaction de sa famille, fit quelques mouvements.» Selon le Journal Le Monde qui rapporta l’événement, «
Depuis, M. Gomez est dans un état critique, mais il reste mort pour l’état civil. Des démarches sont entreprises pour lui redonner vie ”officiellement” sur les registres de la mairie.» L’erreur commise par ce médecin n’a rien d’exceptionnel, si l’on se réfère aux nombreux cas relatés dans la littérature spécialisée et même dans des journaux. En 1856, un homme fut exhumé après que l’on eut entendu des bruits provenant de sa tombe. Mais l’attente de l’autorisation de la police et celle du clergé avait été longue. Lorsque le cercueil fut ouvert, l’homme était mort. Son corps était déchiré et couvert de sang. Preuve qu’il avait essaye de se libérer de cette effroyable prison. Vers la fin du XIXème siècle, le comte Karnice-Karnicki, se basant sur le chiffre d’une fausse mort sur trente mille, arriva à quatre millions d’inhumations prématurées en Europe au cours de l’ère chrétienne. Précisons à la suite de B. Heuvelmans que cette estimation concerne une époque au cours de laquelle la famine, les guerres et surtout les épidémies faisaient rage. Les morts étaient donc hâtivement ensevelis. En outre, les moyens de vérifier la réalité des décès étaient limités. La complexité du problème, aussi bien dans le passé que dans le présent, repose sur les difficultés à définir la frontière qui sépare la vie de la mort, celle-ci « n’étant pas un point fixe », comme le précisent A. Sotto et V. Oberto. Mais plutôt « un processus qui s’allonge dans le temps, et dont personne n’en est à même de juger la durée.
» Dans un manuel de médecine légale parue en 1836, M. Ryan écrivait : « Les hommes tués apparemment d’une manière brutale par certaines blessures, maladies ou décapitations, ne sont pas vraiment morts mais sont dans des conditions incompatibles avec la vie. » De la mort apparente à la mort clinique Selon les données fournies par les hommes de science, la mort apparente se caractérise par un ensemble de signes, dont les plus connus sont les suivants : l’insensibilité, la disparition de la tension musculaire, la chute de la température, l’arrêt de la respiration et l’absence de pouls. Il s’agit effectivement de signes de mort apparente, puisque des personnes noyées, électrocutées ou asphyxiées qui se sont trouvées à ce stade du processus ont pu être ranimées. En outre, certains individus peuvent même ralentir ou arrêter à volonté des fonctions jugées vitales. Par exemple, des fakirs savent stopper l’activité de leur coeur pendant une dizaine de minutes. Ce, sous le contrôle de spécialistes de l’électrographie. Des adeptes du hatha-yoga ont maitrisé une technique leur permettant de réduire considérablement leur consommation d’oxygène. Ils peuvent rester apparemment sans respirer pendant de longues heures.
« Conditions fatales pour n’importe quels autres hommes », précise un chercheur. La littérature spécialisée rapporte le cas d’un certain colonel Townsend qui suspendit si longtemps sa respiration devant une commission d’experts que ceux-ci certifièrent qu’il était décédé et rentrèrent chez eux. Townsend recommença l’expérience le lendemain. De fait, et sans entrer dans les détails, tous les signes de la mort apparente sont bel et bien sujets à caution. Une température anormalement basse est considérée comme un signe certain de mort clinique. Mais on n’est pas tout à fait d’accord sur ce que doit être la température ”normale”. Et pourtant un jeune Suédois rescapé d’une avalanche se remit complètement d’une température de 17º C. Or d’après la formule établie par les médecins légistes [10(37-Température rectale)/8], il aurait dû être mort depuis vingt-cinq heures. Qu’en est-il donc de la mort clinique ? Sur le plan médical classique, la mort clinique succède à cet état voisin de la syncope. Tous les signes de vie ont disparu, mais l’organisme n’est pas encore mort. L’activité biologique continue. Même à la mort du cerveau, le corps est encore, biologiquement parlant, vivant. Les expériences du biologiste Roffo en témoignent éloquemment. Ayant gardé dans un liquide physiologique à 20º des fragments d’organes, il a noté que vingt-trois jours après, on pouvait en retirer des cellules susceptibles d’être cultivées. Mais ce qui est vrai des cellules ne l’est pas des tissus, dont la vie se poursuit pendant une durée variable selon leur fragilité. C”est notamment le cas des ganglions spinaux de l’oeil. Par contre, les ongles et les cheveux continuent de pousser. Les spermatozoïdes conservent leur mobilité des jours, voire des semaines. Ne faudrait-il pas dès lors se demander si les signes classiques de la mort réelle ne sont pas à réviser, compte tenu des nouvelles percées des sciences biologiques et de la médecine. Techniques médicales et constatation de la mort Pour mieux diagnostiquer la mort, des experts sont d’accord pour réclamer comme nécessaires, ou pour proposer comme utiles, des explorations supplémentaires à l’aide de techniques et d’appareils appropriés. La plus importante, la plus couramment employée, comme aussi la plus discutée de ces méthodes exploratoires est celle de l’électro-encéphalogramme (EEG). L’électro-encéphalographe est un instrument qui capte et mesure les ondes électriques émises par le cerveau en activité L’électro-encéphalogramme (l’EEG) est le tracé enregistré par l’appareil en cours d’opération. Normalement, ce tracé est constitué de courbes, d’allures et de rythmes différents. En cas de mort cérébrale (et même de mort simplement corticale), il est caractérisé par un silence électrique complet. On parle alors d’EEG zéro, linéaire ou plat. Selon les spécialistes, l’EEG plat joue dans la constatation de la mort du cerveau deux rôles si importants qu’il en devient, en pratique, quasi indispensable. Le premier est un rôle de « prospection préalable du terrain », comme l’a souligné Christoph Kaüfer, et le second est considéré comme une « confirmation des signes cliniques reconnus », conformément aux conclusions de la commission ad hoc de l’Université Harvard en 1968. Plusieurs spécialistes n’hésitent pas cependant à parler de l’insuffisance de l’EEG quant au diagnostic de la mort cérébrale, donc de la mort de l’être humain, de la mort proprement dite. Ils reconnaissent que l’EEG linéaire ne saurait être à lui seul considéré comme le symptôme princeps de la mort du cerveau. Trois réserves ont été avancées à ce sujet. D’abord, l’EEG a été parfois démenti par les faits. Ensuite, l’EEG plat ne reflète, de soi, que l’état fonctionnel du cerveau à un moment donné ; il ne prouve pas de manière incontestable que la perte des fonctions cérébrales est irrémédiable. Enfin, l’EEG ne traduit que l’activité du cortex et ne garantit aucune conclusion quant à l’état des couches subcorticales. Selon M. Marcotte, ce dernier point est d’importance capitale. L’EEG linéaire, précise-t-il, « n’a valeur de preuve qu’à condition d’établir la différence entre la mort du cortex (mort irréversible) et la mort cérébrale totale (coma dépassé) Le cas qui va être relaté, choisi entre mille, est assez révélateur. Une fillette de huit ans venait de ”mourir” dans un hôpital. L’électroencéphalogramme était plat. Les médecins ont donc annoncé à la famille qu’ils allaient débrancher les appareils de mesure, puisqu’il n’y avait plus rien à faire. La famille a protesté, vociféré même. Elle a demandé aux autorités médicales de garder leur fille sous surveillance pendant une semaine, car, dit-elle, un miracle allait se produire. Huit jours plus tard, la petite fille est revenue à la vie et a repris peu de temps après le chemin de l’école. Des neurologues européens et anglo-saxons ont indiqué que l’EEG plat ne prouve en vérité que la mort du cortex et que celle du tronc cérébral relève d’autres critères. Comme l’écrit H. Fischgold dans un article paru dans ”Les Cahiers de Laennec”, « Nous avons la certitude que le tracé linéaire et l’absence de toute respiration spontanée (symptôme clinique par excellence de la mort du tronc cérébral) montrent que le système nerveux central a cessé de fonctionner de haut en bas, du cortex au bulbe. » Pour leur part, M. Goulon et P. Babinet proposent, pour résoudre les cas douteux, la confirmation de l’EEG plat ”ordinaire” par l’EEG ”profond” enregistré à l’aide de fines électrodes introduites par des orifices de trépanation, en direction des couches médianes et intérieures du cerveau. Selon les deux auteurs, « cette technique a été proposée parce qu’une activité sous-corticale pourrait persister alors que le cortex est muet. » Pour pallier les insuffisances de l’EEG, différentes méthodes complémentaires d’exploration ont été proposées, à savoir : – Echo-encéphalogramme – Mesure de la différence arterioveineuse en oxygène à la base du crane – Étude isotopique du cerveau – Contrôle de l’enzyme bêta dans le liquide méningé du patient en état de coma dépassé. Il semble que toutes les techniques proposées, ainsi que les signes traditionnels, ne permettent pas un diagnostic précis du phénomène de la mort. Mais la science médicale est-elle pour cela à court de moyens ? Nullement. Pour une redéfinition de la mort «Il n’existe que deux moyens d’être certain du décès » a dit le professeur Lehman à Wade Davis. «L’un est la mesure de l’activité cérébrale et cardiaque ; cela exige des appareils compliqués et n’est pas infaillible. L’autre, le seul qui soit sûr, est la putréfaction, et cela demande du temps.» Les cas Narcisse, Francine, Natagette, pour ne citer que les plus connus, posent un véritable problème à cet égard. Inhumés publiquement, ils seront remarqués des années plus tard bien vivants. Nous n’aborderons pas pour l’instant la question de la zombification, qui est un sujet complexe. D’un autre côté, on sait qu’il existe des corps qui n’obéissent pas à la loi naturelle de la putréfaction. Les exemples sont légion. Citons en passant : les saintes catholiques Ethelred et Cécile, saint André Bobola, l’archiprêtre Alexis Medvedkov, le patriarche bouddhiste Hui Neng, le tyran Cristian Kahlbutz. Tout s’est passé comme si ces corps refusaient d’obéir à la parole biblique : « Poussière, tu es ; poussière, tu redeviendras. » Comme le souligne un auteur très au fait de ces questions, l’état de conservation anormale de certains cadavres pose un sérieux problème à la science. « Entre le moment où un corps est en vie et celui où commence le processus de décomposition, s’étend un ”no man’s land” qui peut parfois durer plusieurs siècles. » L’ethnologiste français Rémy Chauvin parle d’un état intermédiaire, d’un troisième état, qui est, « la suspension de la vie ». Le scientifique cite à l’appui de sa thèse, le cas d’une petite araignée appelée ‘tartigrade’ qu’on trouve sur les tuiles des toits provençaux quand la température monte en été jusqu’à plus de 50ºC. Quand on dépose le tartigrade sur un buvard pour le réhydrater avec une goutte d’eau, il commence à se regonfler, revit et, au bout d’une heure, il s’enfuit ! Ainsi, « notre tartigrade n’était ni mort ni vivant, mais dans un état de suspension où les fonctions vitales de son organisme n’ont pas été abimées, mais arrêtées. » D’autres chercheurs, dont Lyall Watson, appelle ce troisième état, l’état de goth. Il ne commence que lorsque les cellules ont subi un dommage chimique ou un isolement physique assez important pour les isoler de leur source d’organisation. Les premiers organes à faire l’expérience de la mort cellulaire absolue sont toujours ceux qui présentent la plus forte spécialisation, comme le cerveau et l’oeil. Tenant compte de ces données, le laboratoire de physiologie expérimentale de ressuscitation de Moscou a décrit la mort clinique en ces termes : « État dans lequel tous les signes extérieurs de vie (conscience, reflexes, respiration et activité cardiaque) sont absents, mais où l’organisme dans sa totalité n’est pas encore mort ; les réactions métaboliques des tissus continuent de s’opérer, et sous certaines conditions, il est possible de restaurer toutes ses fonctions ». De ce point de vue. Il est facile d’admettre qu’il y a des degrés dans la mort et que la mort clinique (interruption des fonctions vitales) intervient quelque temps avant la mort absolue (marquée par l’anéantissement des cellules produisant ces fonction). Comme nous l’avons souligné plus haut, les cheveux et les ongles continuent de pousser, le foie poursuit sa fabrication de glucose, et l’on peut prélever des cellules sur le corps et les cultiver avec succès plus de soixante-douze heures après la mort clinique. Ils sont nombreux, les auteurs qui soutiennent que ce diagnostic de la mort, impossible à établir, repose sur le libre arbitre, la conscience du médecin. Le cas de Karen Quinclan est là pour démontrer que le médecin est souvent impuissant à différencier les états intermédiaires entre la vie et la mort. Cette jeune Américaine de vingt ans était dans le coma depuis un an, lorsque ses parents réclamèrent le droit d’interrompre sa vie végétative. La Cour suprême de l’Etat du New Jersey nomma des experts et des contre-experts afin d’examiner Karen. Les médecins assurèrent qu’elle se trouvait dans un état de coma dépassé, pouvant amener la mort biologique si l’on débranchait les appareils de maintien en survie. Mais lorsqu’on eut enlevé à la jeune femme tout son équipement protecteur, son organisme continua à fonctionner par ses propres moyens ! Tiens ! Nous allions oublier de rapporter que le même weekend où s’est produit le cas Christella, un nouveau-né déclaré mort par une équipe médicale d’un hôpital de Romania, en Argentine, a été retrouvé vivant, 12 heures après, à la morgue de l’hôpital. « Cette nuit-là, nous sommes allés à la morgue », a indiqué le père. « Nous avons voulu prendre une photo de notre fille. Mais quand un ouvrier a ouvert le tiroir, nous avons entendu un cri et elle était vivante. » C’est à la lumière de ces données qu’il faudra essayer de comprendre les diagnostics erronés de décès, dont celui de Jean Wilbert Elma. Les médecins doivent donc faire preuve de prudence. La même prudence est conseillée aux propriétaires de morgue, du moins aux vrais, à ceux qui donnent une dimension morale à leur travail. Sinon beaucoup de personnes seront enterrées vivantes !
Dr Frantz Bernadin Chercheur en paranormal frantzbernadin@yahoo.fr Pour en savoir plus
1. Wade DAVIS, The Serpent and the Rainbow (Presse de la Cité). 2. Lyall WATSON, Histoire Naturelle de la Vie éternelle (Albin Michel). 3. Raymond MOODY, La Lumière de l’Au-delà (Robert Laffont). 4. Jean-Yves CASGHA, Les Mystères de la Vie et de la Mort (France Loisirs) 5. Marcel MARCOTTE, La Mort, cette inconnue (Bellarmin) 6. Georges PASCH, L’Homme paranormal (Robert Laffont) 7. Inexpliqué, No 10 (Grolier) 8. Aimé MICHEL, Les Pouvoirs du mysticisme (Retz) 9. Robert AMBLAIN et coll., Les Corps à prodiges (Tchou) 10. Frantz BERNADIN, Des corps qui ne retournent pas en poussière, Le Nouvelliste fin Avril 2006. 11. Frantz BERNADIN, Vers une redéfinition de la mort, Magazine Universel No 1, Avril 1995. 12. Frantz BERNADIN, La Mort : les différentes étapes du processus, Magazine Universel No 2 Juin 1995. 13. Frantz BERNADIN, La Mort clinique, Le Nouvelliste du 12 octobre 2005. 14. Alain SOTTO / Varinia OBERTO, Au-delà de la mort (Presses de la Renaissance)
Share:

Author: `