Haïti-Minustah-ONU : Intervention de l’Ambassadeur Denis Régis à l’ONU concernant la Minustah

Haiti Press Network

“Le Représentant Permanent de la République d’Haiti auprès de l’Organisation des Nations Unies a New York,  l’Ambassadeur Denis Régis,  est intervenu le 11 avril 2017 au Conseil de sécurité des Nations Unies à la 7920e séance du Conseil sur la “question concernant la MINUSTAH”.  HPN publie le texte de l’intervention du diplomate haitien”.

INTERVENTION DE M. DENIS REGIS

AMBASSADEUR – REPRÉSENTANT PERMANENT

DE LA RÉPUBLIQUE D’HAITI

A

LA 7920E SÉANCE DU CONSEIL DE SÉCURITÉ DES NATIONS UNIES

‘’LA QUESTION CONCERNANT HAÏTI ET LA MINUSTAH’’

New York, le 11 avril 2017

Madame la Présidente,

Madame la Représentante Spéciale du Secrétaire général,

Excellences,

Mesdames, Messieurs,

1-               Je remercie, tout d’abord, le Conseil de sécurité d’avoir bien voulu inviter le Gouvernement de la République d’Haïti à faire valoir ses vues et observations sur le Rapport S/2017/223 du Secrétaire général sur la Mission des Nations Unies pour la stabilisation en Haïti (MINUSTAH).  Je tiens à exprimer les vifs sentiments de gratitude du Gouvernement haïtien au Secrétaire général des Nations Unies, qui, dans son premier Rapport sur la MINUSTAH, fait montre à l’égard du peuple haïtien d’un esprit de solidarité et d’un engagement dont nous lui savons profondément gré.  Son rapport, objectif, bien documenté et équilibré, et ses recommandations judicieuses, témoignent de sa hauteur de vues et de sa générosité d’esprit bien connues.

Madame la Présidente,

2-         Les progrès accomplis ces dernières années vers l’instauration d’un État de droit en Haïti, bien que ‘’limités’’ à certains égards, demeurent indéniables.  Ils sont clairement mis en évidence dans le Rapport.  Les carences institutionnelles sont aussi soulignées, de même que la lenteur de certaines réformes essentielles.  Nombreux sont les obstacles qui jalonnent encore la voie vers la primauté du droit et l’épanouissement des droits de l’homme en Haïti.  Le Rapport met aussi en relief les graves défis qui se posent sur le plan socioéconomique, les effets de la diminution des flux d’aide publique au développement,  l’urgence sur le plan de la sécurité alimentaire, parallèlement à la détérioration de la situation sanitaire, illustrée par la recrudescence de l’épidémie de choléra.  Mais, des lueurs pointent à l’horizon.

3-         L’avènement à la présidence de Son Excellence Monsieur Jovenel MOÏSE, le 07 février 2017, au terme d’un processus électoral laborieux et complexe, mais couronné d’un franc succès, a été unanimement salué comme un tournant décisif dans la vie politique en Haïti.  Comme le souligne le Secrétaire général dans son Rapport, avec la conclusion pacifique du processus électoral et le retour à l’ordre constitutionnel, c’est un cap important qui vient d’être franchi.  Des élections générales, aux résultats incontestés, ont été tenues.  Le transfert pacifique du pouvoir, la restauration du Parlement dans la plénitude de ses attributions, la légitimité des élus, la désignation d’un Gouvernement d’ouverture rassemblant quelques-unes des principales formations politiques représentées au sein de la législature, sont autant d’éléments constitutifs du socle de stabilité que le nouveau Gouvernement, dirigé par le Premier Ministre  Jack Guy LAFONTANT, s’emploie à consolider.

4-         L’ ‘’impartialité’’ et le ‘’professionnalisme’’ démontrés par les institutions haïtiennes dans le cadre de ces élections ont été soulignés à juste titre dans le Rapport.  A cet égard, il convient de se féliciter du rôle joué par la MINUSTAH dans le renforcement des capacités de la Police nationale d’Haïti, qui a été indiscutablement un élément clé du climat de sécurité et de stabilité instauré.  C’est là, sans aucun doute, l’une des réalisations marquantes qu’il convient de porter au crédit de la Mission.  Maintenant que l’objectif de création d’un environnement ‘’sûr et stable’’ – un des axes majeurs du mandat confié à la MINUSTAH par la Résolution 1542 (2004) du Conseil de sécurité a été atteint -, il s’agit de surmonter les handicaps structurels et de trouver des réponses aux graves problèmes qui ont compromis pendant si longtemps la stabilité politique, sociale et économique d’Haïti, et qui ont constitué un frein à l’investissement direct étranger dans le pays.  Le Rapport du Secrétaire général donne toute la mesure des défis à relever.

5-         A cet égard, le Président de la République,  de concert avec le Gouvernement et le Parlement, vient de donner le coup d’envoi d’un ‘’programme de réformes institutionnelles’’ afin de s’attaquer aux défis les plus pressants qui se posent sur les plans sociopolitique et économique, notamment celui de ‘’faire passer Haïti d’une situation de fragilité économique à celle d’une croissance soutenue’’.  C’est d’ailleurs dans cet esprit de dialogue et de concertation que le Premier Ministre a présenté au Parlement un ambitieux programme d’action, qui vise à mettre en œuvre un certain nombre de réformes jugées essentielles, sur les plans économique et social, sur le plan de la sécurité, dans le secteur de la justice et des droits de l’homme, bref, dans le domaine de la consolidation de l’État de droit, parallèlement à la relance soutenue de la croissance et du développement.  A ce sujet, nous accueillons favorablement le désir manifesté par les Nations Unies de soutenir activement les priorités du Gouvernement et les grands axes de son plan d’action, en apportant leur aide, entre autres, à l’organisation des ‘’États généraux sectoriels’’ de la nation.

Madame la Présidente,

6-         En ce qui concerne le mandat de la MINUSTAH, il existe une parfaite convergence de vues entre l’ONU et le Gouvernement haïtien quant au désengagement progressif et ordonné de la MINUSTAH après 13 ans de présence en Haïti.  Le Gouvernement haïtien tient pour essentielle la ‘’consolidation des acquis’’ en matière de sécurité et de stabilité.  Le retrait échelonné des composantes militaires et civiles de la MINUSTAH doit permettre aux institutions haïtiennes concernées d’assumer efficacement le relais des fonctions exercées jusque-là par la Mission.  Les deux parties doivent, par conséquent, convenir d’un calendrier de retrait qui ne puisse donner lieu à aucune espèce de vide sur le plan de la sécurité.  La période de transition proposée répond ainsi au commun souci de voir la Police nationale d’Haïti dotée d’une capacité adéquate d’assumer au fil du temps la pleine responsabilité des besoins du pays en matière de sécurité et de ‘’faire face à toutes les menaces d’instabilité à l’intérieur du pays, indépendamment d’une présence internationale en uniforme’’.

7-         Voilà pourquoi le Gouvernement haïtien appuie la recommandation du Secrétaire général relative à la ‘’prorogation du mandat de la MINUSTAH pour une période finale de six mois’’, l’échéance initiale étant reportée au 15 octobre 2017.  De même, il appuie la recommandation faite au Conseil de sécurité d’établir, sous un nouveau nom, une nouvelle présence, dont les fonctions seront axées principalement sur le renforcement de l’État de droit et de la police.  Dans cette perspective, le Gouvernement haïtien souscrit aux modalités selon lesquelles s’opèrera la transition, notamment :

7.1-            Le retrait complet, mais échelonné, des 2370 membres de la composante militaire durant la période de transition ;

7.2-            La réduction du nombre d’unités de police constituées (UPC) – et du nombre de policiers individuels ;

7.3-            La participation de la nouvelle mission à la mise en œuvre du Plan de développement stratégique de la Police nationale d’Haïti ;

7.4-            L’intégration des activités de la nouvelle mission à l’Équipe-pays des Nations Unies dans la prise en compte des besoins résiduels d’Haïti en matière de stabilisation, ainsi que son ‘’rôle de bons offices’’ en appui à la stabilité politique et à la bonne gouvernance.

8-         Le principe directeur devant guider le rôle et la présence futurs des Nations Unies en Haïti est d’assurer une transition responsable, qui fait fond sur les réalisations des 13 dernières années tout en répondant aux besoins prioritaires en matière de stabilisation et de renforcement des capacités du pays, note le Secrétaire général.  Le Gouvernement haïtien adhère à cette vision. Il continuera de travailler en étroite concertation avec les Nations Unies en vue de la pleine réussite de cette nouvelle phase de leur coopération.  Il souhaite également que l’appel des Nations Unies à un nouvel élan de solidarité avec Haïti trouve le plus large écho auprès de la communauté internationale.

9-         C’est dans cette optique que le Président de la République et le Gouvernement haïtien accordent le plus haut intérêt à la réactivation des mécanismes d’aide humanitaire et de reconstruction dans les régions dramatiquement affectées au mois d’octobre dernier par l’ouragan Matthew.  Des populations entières vivent encore dans la pénurie et la détresse, douloureusement victimes de l’exposition d’Haïti aux changements climatiques.  Je renouvelle ici l’appel des autorités haïtiennes à maintenir le Sud et la Grande-Anse d’Haïti dans l’agenda des institutions humanitaires, des organisations non-gouvernementales et des partenaires de coopération du pays, à travers les structures de l’État haïtien.

10-       Comme elle l’a fait le 1er décembre 2016 à la réunion d’information informelle avec le Secrétaire général sur la ‘’nouvelle stratégie de lutte des Nations Unies contre le choléra en Haïti’’, la délégation haïtienne réitère la valeur qu’attache le Gouvernement haïtien à l’approche en deux volets préconisée par le Secrétaire général dans le cadre de l’éradication du choléra en Haïti.  Le Gouvernement souhaite ardemment et urgemment que soient réunis dans les délais requis les fonds indispensables à la mise en œuvre des volets I et II du Plan d’action, soit 400 millions de dollars sur deux ans.

11-       Le Gouvernement haïtien profite de cette occasion pour adresser ses remerciements  à tous les pays amis, aux membres du Conseil de sécurité, aux pays contributeurs de troupes, à tous les partenaires de coopération d’Haïti, pour leur engagement soutenu, à un titre ou à un autre, à la MINUSTAH.  Que la Représentante Spéciale du Secrétaire général des Nations Unies, Madame Sandra HONORÉ, soit remerciée et félicitée pour le difficile travail qui est le sien depuis bientôt quatre ans.

12-       A cette croisée des chemins, où un climat sûr et stable permet au peuple haïtien d’entrevoir de nouveaux horizons, le Gouvernement souhaite ardemment pouvoir compter sur le soutien continu de tous ses partenaires dans le cadre de la nouvelle présence des Nations Unies en Haïti.  Il appelle la communauté internationale à apporter tout son appui à la difficile tâche de reconstruction des infrastructures essentielles du pays, de la croissance soutenue, du progrès social et du développement durable.

Je vous remercie.

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