Des imposteurs entravent le PSUGO

L’imposture mine le programme de scolarisation universelle gratuite et obligatoire (PSUGO). De nombreux cas de corruption enregistrés dans ce programme laissent planer de sérieux doutes quant à sa transparence et son effectivité.

La crédibilité du PSUGO, instrument de concrétisation de l’accès à l’éducation gratuite, prôné par le pouvoir Martelly/Lamothe, est remise en question. Aux suspicions engendrées par les méthodes actuelles de gestion du Fonds National de l’Éducation (FNE), s’ajouteraient un ensemble d’impostures. Le dernier en date est celui révélé par le commissaire du gouvernement près le tribunal de Première instance de Port-au-Prince, Me Lucmane Delile. Ce dernier a fait savoir au cours d’une conférence de presse tenue le lundi 4 mars écoulé, que quatre pseudo-directeurs ont été arrêtés par la Police Nationale d’Haïti dans le cadre de ce programme. Ces individus qui, en fait, ne dirigent aucune école, ont pu escroquer l’argent destiné à la subvention des écoles inscrites à ce programme.

Selon M. Délile, il existerait plus d’une centaine de cas du genre. Pourtant très peu d’entre ces imposteurs ont été appréhendés par la Police. Une enquête serait en cours à ce sujet, selon, M. Jean Wilnord Pierre, responsable d’une des directions qui pilotent le PSUGO. Il a toutefois révélé que 30 écoles inscrites à ce programme n’existeraient pas selon les recherches en cours. D’autres écoles, estimées à plus de 200, sont introuvables. En dépit du pullulement d’écoles fictives, les demandes d’inscriptions d’écoles à ce programme, reçus par le ministère de l’Éducation nationale et de la Formation professionnelle (MENFP), sont chiffrés à 10.000, selon M. Pierre.

D’aucuns se demandent comment certains individus parviennent à tromper tout le système qui gère le programme de scolarisation universelle. Les fraudeurs présumés bénéficieraient-ils du soutien de certains acteurs influents au niveau du MENFP ou chez d’autres partenaires ? Les responsables du PSUGO sont muets à ce sujet. M. Pierre, conscient de certaines lacunes liées à ce programme, évoque le processus d’identification des écoles qui n’a pu atteindre que six départements géographiques du pays.

En tout cas, l’opération menée par la PNH relative au détournement de 10 millions de gourdes au bureau régional du MENFP à Port-de-Paix, atteste de la thèse selon laquelle les auteurs intellectuels qui sapent le PSUGO siègent au sein de ses différentes entités de pilotage. En effet, l’enquête concernant cette affaire a abouti selon M. Antoine Atouriste, directeur de l’ULCC, à l’inculpation de 163 individus. Parmi lesquelles figurent le directeur du bureau régional du Nord-Ouest ainsi que des employés d’institutions bancaires par le biais desquels se sont effectuées les transactions.

Une partie de la somme détournée, soit quatre millions de gourdes, a pu être récupérée en attendant que la justice haïtienne procède à la saisie des biens des personnes jugées coupables en vue de restituer à l’État haïtien les six millions restants. Puisque, selon M. Atouriste, ce montant n’a pas pu être retracé.

Le PSUGO se porte mal selon toute vraisemblance. Hormis les nombreux cas de corruptions, d’autres composantes du programme seraient aussi affectées. C’est le cas du programme national de cantine scolaire (PNCS). Les employés travaillant dans cette structure ont entamé, la semaine dernière, un mouvement de grève. Et pour cause, on leur devait trois mois d’arriérés de salaires.

Selon les chiffres officiels, 1.287.000 enfants issus de 2413 écoles bénéficient du programme de scolarisation universelle, gratuite et obligatoire. Cet effectif serait biaisé si l’on inclut les centaines d’écoles fictives et de pseudo-directeurs qui font l’objet d’enquête et de poursuite judiciaire.

Jean Michel Cadet
Jeanmich83@yahoo.fr
Le Matin
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