Denis O’Brien compte sur une Haïti plus intelligente

Denis O’Brien compte sur une Haïti plus intelligente
Le Nouvelliste | Publié le : 2013-02-08
 Denis O'Brien
Denis O’Brien
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Lorsque le milliardaire irlandais Denis O’Brien a entrepris de bâtir une compagnie de téléphone cellulaire dans le pays le plus pauvre de l’hémisphère occidental, les sceptiques n’y croyaient pas. ( il n’y avait pas de pénurie de sceptiques). Six ans plus tard, Digicel, la compagnie de O’Brien, est le plus grand investisseur du secteur privé en Haïti et compte 4,8 millions d’utilisateurs, soit environ la moitié de la population. C’est un guide rare de l’esprit d’entreprise dans un pays qui lutte encore pour se reconstruire après le séisme de 2010. Les projets ambitieux de Denis O’Brien font partie de sa vision optimiste pour Haïti qui contraste fortement avec les prévisions généralement sombres pour un pays fragilisé par de perpétuels troubles politiques et des catastrophes naturelles. La promotion de l’entrepreneuriat national compte parmi les activités rares en Haïti où le gouvernement et les banques ont peu fait pour stimuler l’investissement et une frange du secteur de la petite entreprise a toujours profité des monopoles d’importation qui entravent la production locale. Lors d’une visite éclair, peu avant Noël, O’Brien, 54 ans, a voyagé de New York vers Haïti à bord de son jet privé en vue de prendre part à une réunion mensuelle avec le conseil de Digicel Haiti. Il a ensuite organisé un gala pour célébrer « l’Entrepreneur Digicel de l’année », un événement télévisé importé de son pays l’Irlande afin d’inspirer le secteur de la petite entreprise. Six pieds de hauteur, avec des cheveux blancs et les joues vermeilles, O’Brien est facile à repérer dans la foule composée pour la plupart d’hommes d’affaires locaux et de dignitaires, parmi lesquels le président Michel Martelly. «Haïti a besoin de plus de gens comme vous », a déclaré Martelly. N’était Denis O’Brien, nous serions assis ici tout seuls. ” Téléphones pour les pauvres Le Groupe Digicel est une société privée fondée par O’Brien en 2001 et basée à la Jamaïque, avec 13 millions de clients dans 31 marchés émergents, principalement dans les régions des Caraïbes et du Pacifique. O’Brien détient 94% des actions de Digicel et fait partie de la liste Forbes des milliardaires (n ° 205) de l’année 2012 avec une valeur nette de 5 milliards d’euros. Il se modèle sur le milliardaire britannique d’origine Soudanaise Mo Ibrahim, fondateur de Celtel, un réseau de téléphonie cellulaire établi dans toute l’Afrique et Sunil Mittal, fondateur de Bharti Airtel, une compagnie basée en Inde. Ibrahim a vendu Celtel en 2005 pour 3,4 milliards de dollars et dirige maintenant la Fondation Mo Ibrahim pour encourager une meilleure gouvernance en Afrique, tandis que Mittal gère également sa propre fondation. «Ils ont démontré le concept, à savoir que vous pouvez avoir des gens avec très peu de revenu disponible en termes réels, mais qui veulent un téléphone pour lequel ils vont payer. Ce qui va vous permettre de mettre en place un grand réseau», a déclaré O’Brien à l’agence Reuters. Digicel est en train de courtiser le marché du Myanmar, un pays d’environ 60 millions d’habitants qui a un des plus faibles taux de pénétration cellulaire au monde, avec seulement 3% de la population possédant un téléphone en 2011, selon la Banque mondiale. La Digicel déclare qu’il a enregistré des revenus annuels de l’ordre de 2,5 milliards de dollars en mars 2012, avec Digicel Haïti en tête, qui génère des revenus équivalant à 439 millions d’euros. Le lancement de Digicel Haïti en 2006 était un exemple rare d’investissement étranger dans un pays plus habitué à la dépendance de l’aide étrangère. Le Siège social rayonnant de la Digicel inauguré un an avant le tremblement de 2010 a été l’un des rares bâtiments à résister. Il est resté pratiquement intact. Deux sociétés de téléphonie mobile qui offraient des services incomplets et plus coûteux ont été rapidement dépassées au moment où Digicel investissait dans l’infrastructure nationale et offrait des appareils à des prix aussi bas que 7 dollars avec des taux faibles pour la plupart des clients de son système prépayé. « Denis a révolutionné le secteur des communications. Avant, les téléphones portables étaient un luxe et maintenant ils sont un must », a déclaré le ministre du Tourisme haïtien, Stéphanie Villedrouin. «Des talents naturels Les investissements de O’Brien en Haïti vont bien au-delà de la téléphonie. Le mois dernier, il a inauguré la construction du premier hôtel Marriott d’Haïti et la fondation caritative de Digicel dépense des millions pour construire 150 écoles à travers le pays pour 90 000 élèves. Son approche a été acclamée par l’ancien président Bill Clinton, qui dirige la Clinton Global Initiative (CGI) et qui est également l’envoyé spécial des Nations unies en Haïti. O’Brien a coordonné l’entité dénommée Haïti Action Network de la CGI dont les membres ont engagé plus de 350 millions de dollars à l’éducation, projets d’infrastructure et de développement commercial. «Le programme CGI en Haïti est considéré comme l’un des meilleurs. C’est vraiment parce que Denis O’Brien a fait preuve d’un grand leadership », a déclaré Anne Hastings, directrice de Fonkoze, une institution de financement de microcrédit en Haïti. «Il fixe des objectifs que les gens doivent s’atteler à réaliser. C’est inhabituel en Haïti. Son premier investissement non lucratif en Haïti était le Marché en Fer, marché historique à la capitale,au coeur des activités commerciales du centre-ville, que O’Brien, a dépensé des millions pour reconstruire après le tremblement de terre. “Tous les problèmes en Haïti sont réparables, on a juste besoin des compétences nécessaires », a-t-il dit.” Il faut mobiliser les gens et leur montrer comment le faire. Il y a tellement de talents ici, des gens créatifs et inventifs. » Pour appuyer son point de vue, Digicel a déplacé son centre d’appels pour les Caraïbes de langue française de la Martinique vers Haïti. Pour sa première visite en Haïti, M. O’Brien a été frappé par la rue bondée de vendeurs. “Vous avez tous ces entrepreneurs partout dans cette ville. Ils sont nés vendeurs “, a-t-il laissé entendre. En célébrant l’entreprise à un show télévisé, une réalisation de grande qualité, avec des caméras montées sur grues, de l’éclairage et de la glace sèche et des confettis pour le vainqueur, O’Brien espère inspirer une culture nouvelle d’entreprise de substitution aux importations. Les finalistes de cette année comprenaient une entreprise de broyage de café, une société d’énergie solaire, un exportateur de poissons, et des artisans et créateurs de modes locaux. « Espérons que quelqu’un est assis à la maison ou sous un arbre et dit: «J’ai une idée,” souligne O’Brien. De cultiver du riz, au lieu d’en importer. Au lieu de poulets importés, des poules de race. Au lieu d’oeufs importés, des pondeuses. » Le prochain objectif d’O’Brien: lancement d’une révolution de smartphone Haïti et l’offre des services bancaires mobiles pour les humbles. Digicel est en train d’investir dans la bande passante supplémentaire cette année pour gérer un réseau 4G mise à niveau, ce qui augmente son investissement total en Haïti à plus de 600 millions d’euros. “Ce que nous essayons d’avoir c’est le premier réseau mondial de télécommunications dans une économie en développement, et cela n’arrive pas tous les jours”, reconnait l’entrepreneur irlandais Digicel compte sur des entreprises asiatiques telles que Samsung pour continuer à baisser les prix grâce à des semi-conducteurs taïwanais bon marché. “Nous pouvons acheter un smartphone pour 70 dollars aujourd’hui. En 2013, il sera de 30 dollars », a-t-il annoncé, prédisant que les prix atteindraient 10 dans quelques années.
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