Le Barreau de l’ordre des avocats de Port-au-Prince a honoré le samedi 15 décembre dernier 17 avocats dépassant la barre de plus de 50 ans de carrière dans l’exercice du métier d’avocat en Haïti. Déroulée dans une ambiance festive, cette cérémonie marque le retour en force d’une tradition disparue depuis 1927, soit 85 ans après.

17/12/2012

les avocats honorés accompagnés de quelques personnalités du Barreau (photo Marc Régis)

Samedi 15 décembre ! 18h40 ! Il fait froid dans les hauteurs de Bourdon non loin de Pétion-Ville, particulièrement à l’hôtel Montana. Le temps est à la pluie. Des jeunes fleurons du monde de la basoche ainsi que des autorités politiques sont déjà remarqués à la salle Frank dont le décor attrayant frappe au premier regard. C’est la fête, la jubilation. C’est la célébration des noces de diamant et d’or de 17 figures emblématiques, ayant laissé leur empreinte dans l’exercice du métier de Saint-Yves, qui vont être honorées.

Cette cérémonie, qui devait commencer à 7h, allait pourtant retarder de plus d’une heure. Faille de planification ? Entre-temps, des journalistes -ponctuels – s’impatientent. Ils rincent leurs yeux sur des jouvencelles tirées à quatre épingles en la circonstance. Ils papotent. “J’aimerais ce soir interviewer le verbeux Gérard Gourgue”, susurre un confrère tout en extériorisant son appréciation pour celui par qui “l’histoire du pays aurait pu changer”.

Ouf ! 20h14, les jubilations sont lancées. Devant un public sélect, l’émotion est palpable sur le visage des jubilaires. Ils ont marqué leur temps soit par des plaidoyers célèbres soit par leur rectitude tout au long de leur carrière. “Ces 17 ainés représentent l’armature du métier d’avocat en Haïti”, a lancé Me Peter Reynold Delciné, secrétaire général du Jeune barreau de Port-au-Prince, pour qui l’apport de ces ainés dans la vie des avocats de tout acabit est significatif.

Ils ont été pour la plupart, selon Me Delciné, des fervents défenseurs de droit de l’homme et d’autres de véritables serviteurs de l’Etat. “Ce sont des héros, ils valent tous nos honneurs”, a-t-il crié sous un salve d’applaudissement.

En effet, les applaudissements ont plu comme la grêle ce soir-là en signe d’honneur et d’hommage aux jubilaires. Surtout au moment de la remise de plaques d’honneurs (Honneurs au jubilé) à chacun d’entre eux ! Ce fut vraiment de la jubilation !

Cet événement est très symbolique pour le Conseil de l’Ordre. C’est une opportunité majeure pour refaire l’histoire en présentant aux générations montantes ces 17 éminentes personnalités. “Ils sont des modèles de compétence, de combativité, d’engagement et d’attachement à la profession d’avocat”, croit savoir le bâtonnier Carlos Hercule, insinuant que les jeunes avocats ont beaucoup à apprendre de ces ainés qui ont grandement contribué au rayonnement du monde de la basoche en Haïti.

Pour sa part, Me Gérard Gourgue, l’un des jubilaires, figure de proue de l’intelligentsia haïtienne, estime que c’est plus qu’un honneur pour eux d’être honorés ce soir. “Il faut cultiver et pérenniser cette pratique dans la vie du Barreau”, a-t-il dit, air joyeux et gai après avoir esquissé quelques pas de danse comme s’il était à ses années de jeunesse.

Cette cérémonie, concoctée sous le leadership du Barreau de Port-au-Prince, prouve clairement que la société haïtienne est apte à divorcer d’avec les hommages posthumes. Avec au moins plus d’un demi-siècle de vie professionnelle, ces 17 ainés dont Michel Donatien, André Charlmers, Boniface Alexandre, Lionel Sajous, Fabre Bretous, François Latortue, Anthony Viel et Gérard Gourgue entre autres ont bel et bien mérité ces honneurs au regard de leur remarquable parcours d’hommes de loi.

Juno Jean Baptiste
Jeanbaptistejuno@yahoo.fr