Affaire Jean Do : un scandale qui sommeille ?

Subsistant depuis 13 ans aux poussières des tiroirs de la Justice, l’affaire Jean Dominique pourrait, sous le règne de Michel Martelly, voir des actes d’instruction aux retombées plus politiques que judiciaires. Un ancien juge d’instruction sur ce do
15/03/2013
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Subsistant depuis 13 ans aux poussières des tiroirs de la Justice, l’affaire Jean Dominique pourrait, sous le règne de Michel Martelly, voir des actes d’instruction aux retombées plus politiques que judiciaires. Un ancien juge d’instruction sur ce dossier, Me Claudy Gassant reconnait qu’il s’agit là d’un grand défi pour la Justice. Inviter et auditionner des anciens présidents ou des parlementaires en fonction, n’a jamais été chose facile. Me Gassant s’en réjouit. Et si, à la fin de l’instruction, il faut inculper l’un de ces personnages ?

Me Claudy Gassant s’est présenté le mercredi 13 mars dernier au cabinet de l’un des juges d’instruction qui lui a succédé sur ce dossier. Sans commentaires ni révélations à la presse, le magistrat a brandi en sortant le principe sacramentel de la confidentialité de l’instruction. Mais il a fait une annonce importante : « Je ne suis pas l’avocat de l’ancien président René Préval dans le cadre de cette affaire ». Revendiquant sa proximité avec cet ancien président, Me Gassant dit reconnaître qu’il y aurait conflit d’intérêt s’il devait défendre un client dans un dossier sur lequel il a agi comme juge d’instruction.

Cependant Me Gassant dit croire qu’aucun justiciable ne peut user de sa fonction ou de son statut pour se dérober à la Justice. Il s’est même félicité que depuis son passage sur ce fameux dossier Jean Dominique, les hommes politiques comprennent qu’ils doivent répondre sagement aux invitations ou convocations. « Je me réjouis de voir que j’ai permis à tous de comprendre qu’un parlementaire peut sans problème répondre à titre de témoin à une invitation du juge d’instruction », a laissé entendre Me Gassant sur la cour de ce bâtiment au bicentenaire qui sert aujourd’hui de Palais de justice.

« Ce dossier doit arriver à terme, c’est important pour l’image de la Justice haïtienne », souhaite l’’ancien secrétaire d’Etat à la justice, chargé des affaires pénales au cours du second mandat du président René Préval.

Vers Aristide en passant par Jean Dominique ?

Les premières réactions soulevées par le relancement du dossier Jean Dominique faisaient état d’éventuelles persécutions politiques, aux visées anti-lavalas. Mais comme pour tempérer un choc populaire jusqu’ici silencieux, le juge en charge de l’instruction a préféré ne pas convoquer Jean Bertand Arisitde, de si tôt. Cet ancien président a peut-être des lumières à apporter pour éclairer la lanterne du juge perdu dans la nébulosité de ce dossier qui a difficilement survécu au séisme du 12 janvier 2010. Si le juge d’instruction doit auditionner M. Aristide, se rendra-t-il chez lui ou l’attendra-t-il de très tôt en son cabinet, comme René Préval l’avait fait ? Le juge Yvickel Dabrézil a du pain sur la planche. Entre-temps, un journaliste défenseur historique de ses confrères, devenu aujourd’hui conseiller du président Michel Martelly, Guyler C. Delva continue de jurer d’aider jusqu’au bout à l’aboutissement du dossier Jean Dominique. « Si mon père se trouvait impliqué dans ce dossier, je demanderais à la Justice de le poursuivre », laisse entendre Guy Delva pour dire que n’importe qui peut tomber sous le coup de la Justice dans le cadre de l’affaire relative à l’assassinat de l’ancien PDG de Radio Haïti Inter. « Il n’y pas de persécutions politiques », fulmine M. Delva.

À la veille des élections, l’affaire Jean Dominique peut servir à des causes qui ne sont pas essentiellement judiciaires. Si le juge doit souverainement accomplir, au nom de la loi, tous les actes de l’instruction, des observateurs croient qu’on pourrait aller vers un scandale politico-judiciaire.

Eddy Laguerre
laguerreeddy@gmail.com
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