Plus de 200 morts à Kenscoff : Le BINUH dénonce les violences des gangs qu’il a longtemps tolérées

Plus de 260 morts en deux mois, des femmes violées, des maisons incendiées… et un silence gênant sur les erreurs passées de l’ONU en Haïti

Deux mois de terreur dans les hauteurs de Kenscoff. Un rapport conjoint du Bureau intégré des Nations Unies en Haïti (BINUH) et du Haut-Commissariat des Nations Unies aux droits de l’homme (HCDH), publié ce dimanche, fait état d’un bilan dramatique : 262 morts, 66 blessés, des centaines de maisons incendiées et des milliers de déplacés.

Mais au-delà de l’horreur des faits, c’est le discours du BINUH qui interroge. Comment l’institution onusienne peut-elle aujourd’hui condamner les crimes perpétrés par les gangs armés qu’elle a elle-même contribué à légitimer il y a à peine deux ans ?

Le rapport publié ce 7 avril détaille avec précision les six vagues d’attaques menées par des groupes criminels entre janvier et mars 2025 dans la commune de Kenscoff, située à quelques kilomètres au sud-est de Port-au-Prince. Des exécutions à domicile, des corps brûlés, des femmes et jeunes filles violées, plus de 3 000 personnes déplacées… L’horreur est méthodiquement documentée.

Pourtant, aucune mention dans le rapport de la responsabilité de la communauté internationale, notamment du BINUH, dans la montée en puissance des gangs aujourd’hui pointés du doigt.

Quand le BINUH saluait la fédération des gangs sous La Lime

Rappelons qu’entre 2020 et 2022, sous la direction de Madame Helen Meagher La Lime, le BINUH avait adopté une posture troublante face à la fédération de gangs connue sous le nom de “G9 an Fanmi e Alye”, dirigée par Jimmy Chérizier alias “Barbecue”. Cette coalition criminelle, aujourd’hui impliquée dans de nombreux massacres, avait été à l’époque perçue par certains partenaires internationaux comme une tentative de stabilisation locale.

En refusant de condamner fermement cette structuration mafieuse, le BINUH a indirectement renforcé ces groupes armés, qui contrôlent désormais des pans entiers de la capitale et de ses environs.

Des recommandations sans courage face à la crise sécuritaire

Dans son rapport, le BINUH recommande de renforcer les capacités des forces de sécurité haïtiennes, de lutter contre l’impunité, de protéger les populations civiles et d’accroître l’aide humanitaire. Mais ces éléments de langage sont devenus routiniers, alors que le chaos empire.

Ce que beaucoup attendent aujourd’hui, ce n’est pas un simple constat. C’est une autocritique. Un acte de vérité. Car on ne peut se poser en garant de la paix quand on a été silencieux face à la guerre naissante.

Gangs armés : une menace que le BINUH a laissé prospérer

Les massacres à Kenscoff ne sont pas un accident. Ils s’inscrivent dans un processus d’expansion territoriale des gangs armés, qui cherchent à contrôler les zones périphériques de la capitale pour renforcer leur pouvoir stratégique. Pétion-Ville, Carrefour-Feuilles, Mariani, Tabarre, et désormais Kenscoff… chaque localité devient une proie.

Et chaque fois, les réponses sont tardives, dispersées, ou inadaptées. Même le soutien de la Mission multinationale d’appui à la sécurité (MMAS) reste limité face à l’ampleur du danger.

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