Parlement Vs Exécutif: le PRI sanctionne Lamothe

Laurent Lamothe a été frappé de plein fouet par les attaques de la minorité. La loi du plus fort, pour une fois s’est éteinte devant celle du plus faible. Le PRI jouait son avenir lors de cette première séance en Assemblée nationale qui a ouvert la s.

Laurent Lamothe a été frappé de plein fouet par les attaques de la minorité. La loi du plus fort, pour une fois s’est éteinte devant celle du plus faible. Le PRI jouait son avenir lors de cette première séance en Assemblée nationale qui a ouvert la session législative ordinaire. Le gouvernement a été stupéfié. Les représentants du Corps diplomatique étaient divisés par rapport à cette grande première dans les annales du parlementarisme haïtien. Certains ont applaudi, d’autres sont restés pantois.

Non habitué à se faire chahuter, Laurent Lamothe paraissait timoré par le poids des événements. Après quelques minutes pour reprendre son souffle, il a remis sans détour, sans grand discours, un document au président de l’Assemblée nationale qu’il a déclaré être son bilan de l’année écoulée, sous un concert de trompettes et de clochettes ahurissant. Avec sa mine renfrognée, le chef du gouvernement, malgré les accolades et autres embrassades, proches de la flagornerie de certains éléments du groupe majoritaire (PSP), autre fait inédit, s’est senti bien seul au milieu de cette assemblée bruyante et divisée.

La politique du laisser pourrir n’a pas eu, cette fois-ci, les résultats escomptés. Depuis environ deux mois, les députés avaient annoncé leur action. Dans une indifférence insultante, Le PM n’avait pas jugé bon de les rencontrer afin de négocier les contradictions. Pourtant, 48 heures avant la séance il avait décidé d’inviter les parlementaires contestataires. Ce fut trop tard. Le PRI s’était déjà mû en force résistante, d’autant que le PM avait boudé successivement une invitation et une convocation faites par les députés de l’Opposition afin de s’informer sur les 10 millions de gourde par commune prévus dans le budget et destinés à la réalisation de projets de développement. Ils dénonçaient une politique deux poids deux mesures dans la gestion de ces fonds.

En politique, toute action engendre une réaction. Celle-là a été virulente. Elle a fait trembler l’Exécutif. La réponse qui est venue le lendemain, lors d’une conférence de presse tenue à la Primature est symptomatique du malaise qui traverse le pouvoir suite à ce fâcheux évènement. Désappointés, Ralph Théano et Guyler C. Delva se sont convertis en pleureuses funèbres pour exprimer leur regret face à cet épisode qui, à leur goût, a sali l’image du Parlement. Cependant, les propos désobligeants du ministre chargé des relations avec le Parlement discréditent et entament un peu plus l’image du Pouvoir.

La réaction aux insultes de M. Théano n’a pas tardé. L’ancien président de la Chambre basse, Levaillant Louis Jeune, menace d’introduire une résolution devant l’Assemblée des parlementaires afin de déclarer le ministre persona non grata au Parlement. Une autre crise semble poindre à l’horizon au cas où le chef de l’État ne se résoudrait pas à remplacer M. Théano qui n’est pas à son premier accrochage avec des parlementaires. M. Louis Jeune, député de l’Opposition, par conséquent membre de la minorité, a peu de chance de voir sa future requête aboutir, notamment dans un contexte où le bureau est totalement contrôlé par les pro-Martelly.

Laurent Lamothe a donc reçu une véritable gifle lors de cette séance inédite où les 4 députés élus, non encore autorisés à siéger au Parlement, se sont invités, de leur propre chef, au sein de l’Assemblée pour participer à l’ouverture de la session. Depuis, le bilan du Premier ministre est publié dans la presse. Un conseil de gouvernement a été organisé le mercredi 16 janvier. Il aura servi de voie de réponse, et M. Lamothe en a profité pour informer la population sur les activités de son gouvernement. D’aucuns y voient une ultime tentative de laver l’affront historique du 14 janvier.

Martelly en suppléant

Plus décontracté, le président Martelly a suppléé à son ami et Premier ministre, en faisant à sa place un discours bilan qui annonce également les perspectives de 2013. Il n’a pas non plus été épargné du courroux des membres du PRI qui l’ont sanctionné d’un carton jaune, le préservant du rouge, tenant compte du fait qu’il est comme eux un élu du peuple, selon ce qu’a expliqué Sadrac Dieudonné. Cependant, le député des Gonaïves croit que si le pouvoir continue avec sa politique pour le moins inefficace, la population qui a donné mandat au chef de l’État pourra toujours faire entendre sa voix, demander des comptes et peut-être même le départ du Président.

Michel Martelly a toutefois délivré sans ambages son message. Il a justifié ses choix d’intervention par rapport à la situation d’urgence globale dont est frappé le pays. « Il fallait faire des choix et c’est ce que nous avons fait » a-t-il dit en substance. Son appel à l’unité laisse, par ailleurs perplexes ses détracteurs qui l’accusent de promouvoir la division au sein du Parlement, notamment à la Chambre basse, en vassalisant certains élus. En tout cas, le Président reste accroché à ses idées et réitère sa volonté de respecter les cinq « E » qui représentent la charpente de son « programme de gouvernance ».

Revaloriser le capital humain par l’éducation, la construction de deux ports à Port-au-Prince et la transformation de la Croix-des-Bossales en marché touristique, sont entre autres projets chéris par le chef de l’État. De plus, les élections qui devront offrir la stabilité politique au pays se réaliseront au cours de l’année 2013, promet-il. Aussi donc, les négociations continuent, a-t-il indiqué, pour créer l’organe de consensus qui réalisera ces élections.

Si nous devons croire les propos du chef de l’État, 2013 sera l’année de la relance pour Haïti à tous les points de vue. Aussi de nombreux projets devront se réaliser au cours de cette période, notamment dans des secteurs porteurs comme le tourisme a souligné M. Martelly qui entend œuvrer pour attirer les investissements étrangers dans le pays. Pour ce faire, le chef de l’État invite toutes les parties concernées à faire preuve de responsabilité en vue de la création d’un « pacte de responsabilité. » Ce serait là, une attitude bien utile dans la conjoncture actuelle, juge-t-on, pour que les hommes d’État répondent aux exigences de leurs fonctions.

Lionel Edouard
doulion29@yahoo.fr
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