Carnaval des Fleurs, le Sénat veut avoir des explications

Le Nouvelliste | Publié le : mardi 24 juillet 2012
Robenson Geffrard et Danio Darius
Le Premier ministre et son ministre des Finances seront à nouveau convoqués au Sénat de la République pour donner des explications sur la provenance des 65 millions de gourdes allouées au carnaval des Fleurs. En visite à Washington, Laurent Lamothe et Marie Carmelle Jean-Marie n’ont pas pu répondre, mardi, à une première convocation du Grand Corps. Le sénateur Pierre Frankcy Exius n’écarte pas la possibilité qu’ils soient interpellés.
Le sénateur Pierre Frankcy Exius et La ministre des Finances, Marie Carmelle Jean-Marie
Le sénateur Pierre Frankcy Exius et La ministre des Finances, Marie Carmelle Jean-Marie

Même après le carnaval des Fleurs, prévu pour le week-end prochain, ils seront convoqués, a averti le sénateur Pierre Francky Exius. « Ils ont préféré prendre l’avion pour Washington. Cela montre que le Premier ministre accorde plus d’importance à son voyage qu’à cette convocation nationale sur les 65 millions de gourdes allouées audit carnaval. Dans un contexte où des enseignants et des policiers réclament une augmentation salariale, où les couches les plus vulnérables de la population font entendre leur voix », a-t-il énuméré.

Pour le parlementaire, aucun voyage ne devrait être plus important que les institutions d’un pays. « Dans une convocation, le Premier ministre doit être là », a fait valoir Pierre Francky Exius.  Selon lui, tout le monde est conscient que le pays fait face à une situation de misère très grave. « Nous n’avons aucun problème avec le gouvernement, mais les problèmes doivent être posés ensemble pour trouver les solutions », a-t-il dit.

Le parlementaire a aussi critiqué le fait que le Premier ministre soit à la fois chef du gouvernement et ministre des Affaires étrangères. « Son ministre des Affaires étrangères pourrait le précéder dans ce voyage en attendant son retour de la convocation. Mais il cumule les deux fonctions. C’est seulement en Haïti qu’on trouvera une telle situation », a-t-il dénoncé.

Le Premier ministre et le ministre des Finances seront à nouveau convoqués, a averti le sénateur. Selon M. Exius, s’ils ne répondent pas à cette deuxième convocation, ils seront tout simplement interpellés. Une interpellation, rappelons-le, finit toujours sur un vote de confiance ou un vote de censure. Dans le deuxième cas, tout le gouvernement partira.

« Ils savent très bien où le gouvernement a trouvé les 65 millions de gourdes », a répliqué la ministre des Finances.

Avant de quitter le pays lundi pour Washington, Marie Carmelle Jean-Marie, ministre de l’Economie et des Finances, a été très claire et précise : « Les sénateurs savent très bien où le gouvernement a trouvé les 65 millions de gourdes pour financer le carnaval des Fleurs. »

« Les parlementaires savent très bien qu’il existe dans le budget des lignes de subvention qui servent à payer les dettes de toutes les institutions de l’Etat, des arriérés de salaires des professeurs, à financer la réalisation des fêtes champêtres…. C’est de là que proviennent les 65 millions de gourdes, dont 35 millions ont été utilisés pour le paiement des dettes  consenties dans le cadre du carnaval national aux Cayes », a expliqué la ministre.

« Se sont les parlementaires qui ont voté le budget. Ils savent très bien qu’il y a des lignes de subvention qui sont utilisées pour eux. Nous avons beaucoup de demandes des parlementaires lorsqu’ils réalisent les fêtes champêtres ou patronales dans leur département. C’est dans ces mêmes lignes de subvention que nous avons dégagé 30 millions de gourdes pour le carnaval des Fleurs. Pour les autres 35 millions de gourdes, nous les avons tirées d’une ligne de dettes. Cette rubrique est là pour toutes les dettes, celles des parlementaires, des professeurs, entre autres », a poursuivit madame Jean-Marie.

Avec un sourire moqueur, elle a indiqué que les parlementaires ont l’habitude d’exiger plus de fonds dans les lignes subventions de leur allocation dans le budget afin de pouvoir subventionner certaines activités sans passer par le ministère de l’Economie et des Finances.

Pas de 14e mois ni d’augmentation pour les employés de la fonction publique

Les employés de la fonction ne pourront pas bénéficier du 14e mois, institué par René Préval, à l’occasion de la rentrée scolaire, a appelé la ministre des Finances. Selon le grand argentier de la République, toute personne sensible devrait être en mesure de comprendre le choix du gouvernement. Madame Jean-Marie a par ailleurs expliqué que l’augmentation des  salaires des employés de la fonction publique et l’octroi du 14e mois peuvent avoir de graves conséquences sur l’investissement et la maîtrise de l’inflation.

« Quand on décide d’augmenter le salaire des employés de l’Etat avec les surplus du Trésor public, on n’a pas assez d’argent pour investir. Ce qui entraîne l’inflation et la diminution du pouvoir d’achat des citoyens », a souligné la ministre, qui se dit  déterminée à appliquer la politique d’austérité du gouvernement.

Lors d’une séance de travail avec les députés le 10 juillet, le grand argentier de la République avait prévenu que les professeurs des écoles publiques, les policiers n’auront pas droit à une augmentation de salaire. « La masse salariale des professeurs est la plus importante dans le budget de la République. Nous ne pouvons pas les augmenter. Sinon il sera impossible de régulariser la situation des six mille autres professeurs dans le système qui ne perçoivent pas convenablement leurs salaires depuis 2006 », a expliqué la ministre avant d’établir la différence entre salaires et revenus.

Le chef du gouvernement avait écrit aux sénateurs pour les informer de son important voyage de deux jours à Washington, aux Etats-Unis en vue de rencontrer plusieurs partenaires techniques et financiers d’Haïti, a informé la ministre de l’Economie et des Finances.

A la tête d’une délégation composée, entre autres, du président du Sénat de la République, Dieuseul Simon Desras, de la ministre de l’Economie et des Finances, Marie Carmelle Jean-Marie, et de l’ambassadeur d’Haïti à Washington, Paul Altidor, le chef du gouvernement est dans la capitale américaine depuis lundi pour une rencontre avec la Banque mondiale, le FMI et la secrétaire d’Etat américaine.

Robenson Geffrard et Danio Darius
Share:

Author: `